samedi, mars 30

La culture du riz hybride : atouts et défauts du sans OGM

Un riz hybride est actuellement cultivé par le professeur Yuan Longping, titulaire à l’université agricole de Changsha dans le Hunan, membre de l’Académie d’ingénierie de Chine et directeur général du centre national de recherche et développement pour le riz hybride. Selon les médias chinois, ce riz possède une forte résistance face aux ravageurs, sa tolérance au stress est renforcée et il ne contient aucun OGM. Ce professeur et son équipe travaillent depuis plus de 40 ans à l’élaboration de nouvelles souches de « super riz », issues des technologies de sélection variétale.

Le ministre de l'Agriculture Han Changfu (à droite) et l'agronome Yuan Longping, connu comme le "père du riz hybride", ont inspecté mardi une culture à Sanya, la province du Hainan. (Quotidien du peuple)
Le ministre de l’Agriculture Han Changfu (à droite) et l’agronome Yuan Longping, connu comme le « père du riz hybride », ont inspecté mardi une culture à Sanya, la province du Hainan. (Quotidien du peuple)

Les premières variétés ont été lancé en 1974, par Yuan Longping, qui découvre dans les années 1980, que les rendements de ces nouvelles variétés de riz augmentent significativement de 15 à 20%. Actuellement, la Chine abrite 17 millions d’hectares de riz hybride, soit 58% des champs de riz du pays, et le rendement moyen a atteint 6,7 tonnes par hectare en 2012, soit 2,7 tonnes de plus que le rendement unitaire mondial. Une aubaine dans un pays qui compte 1,3 milliards d’individus à nourrir.

Une sélection uniquement végétale

Alors enseignant à Anjiang dans la province du Hunan, Yuan Longping découvre un plant de riz extrêmement grand, qui avait des qualités particulières. « L’épi du riz était grand, et le grain était gros. Sa production était de 7 500 kilogrammes par hectare. C’était un rendement très élevé à cette époque. J’étais très content » a expliqué le professeur à CCTV.

Conservant ce grand planté, il le replante l’année suivante, mais la récolte demeure irrégulière. « J’étais déçu, mais tout à coup j’avais une autre idée. Le grand devait être un hybride naturel« . Il utilise les techniques classiques d’hybridation par fertilisation croisée de deux lignées parentales, l’une domestique et l’autre sauvage et stérile.

Il parvient à avoir des plants avec des caractéristiques spécifiques, comme le rendement, la résistance (au froid, à la sècheresse, aux insectes…), ou encore une forte valeur nutritive. Le problème de ces plants est qu’ils sont stériles, ils doivent être reproduits en laboratoire chaque année. Au départ, Yuan Longping travaille sur l’accroissement quantitatif des rendements avec une diminution de la taille des pieds, de la sensibilité à la verse, de la fragilité des tiges et du tallage abondant et peu fertile, précise l’un des bulletins de veille scientifique et technologique des ambassades de France à l’étranger .

Par la suite, son équipe et lui travaillent à améliorer l’indice de récolte et la diminution de la durée du cycle (de 150-160 jours à 110 jours en 1976), permettant d’avoir une double voire une triple culture. A partir des années 90, Yuan Longping oriente ses recherches vers la résistance aux insectes et aux ravageurs, avec un objectif de stabilisation des rendements. Enfin, dans les années 2000, il tente d’améliorer la qualité du grain, son format, son arôme, son comportement à la cuisson. Des normes sont fixés, permettant une diversification des semences selon la demande.

« Je n’ai pas peur de prendre un risque. Ce n’est pas important pour moi. Les gens ne vont pas se moquer de vous parce que vous avez échoué après tant de durs efforts. Si je rate, je recommence » a expliqué Yuan Longping, dont le riz contribue à l’augmentation de la production chinoise de riz dans le monde.

Un « super riz » avec des défauts quand même

Pour le chercheur Li Changping, président de l’Institut chinois de planification et de design ruraux nouveaux, basé à Beijing et secrétaire général de la province du Hubei, le riz hybride a mauvais goût par rapport aux variétés traditionnelles. Le riz dépend énormément d’engrais, il est peut résistant aux crues et aux tempêtes, et surtout il oblige les paysans à acheter des semences à chaque cycle de culture p

Li Changping a affirmé que le véritable rendement économique de l’hybride par rapport à la semence classique, ne serait que de 5 à 10%, raison pour laquelle, selon lui, l’État ne devrait pas imposer la culture du riz hybride aux agriculteurs. La position de ce dernier est confirmée par les récoltes désastreuses qu’il y a eu dans la province de l’Anhui en octobre 2014. Celles-ci ont été causée par des conditions météorologiques extrêmes et des maladies attrapées par le riz.

La société dirigée par Yuan Longping, Yuan Longping High-Tech Agriculture Co Ltd, est aujourd’hui mise en cause pour avoir commercialisé une variété de riz hybride « Liangyou 0293 » à faible résistance fongique à la pyriculariose (principale maladie du riz), provoquant une chute des rendements, voire même une absence totale de récoltes dans certaines régions de la province.

Les mauvaises récoltes ont provoqué la colère des agriculteurs, qui ont dénoncé la publicité mensongère de la société de Yuan Longping. Pour exemple, dans le comté de Wuhe, les riziculteurs ont vu leurs rendements chuter, passant des 500 kg par mu attendus à 50 kg ou même zéro. La Yuan Longping High-Tech Agriculture Co a assuré que les pertes des agriculteurs seront couvertes par l’assurance et qu’elle se réunira avec eux pour discuter de nouvelles mesures.

Face à cela, les autorités agricoles chinoises ont décidé de procéder à des évaluations plus complètes sur certaines variétés de riz hybride. Selon Zhang Taolin, vice-ministre de l’Agriculture, les évaluations porteront sur les rendements élevés et la capacité d’adaptation des variétés à différents environnements de culture, y compris la résistance aux maladies et aux insectes.

« Il y aura également des évaluations de l’efficacité des engrais et de la qualité du grain du riz hybride », a-t-il indiqué lors d’une conférence de presse organisée le 14 avril, au Bureau d’information du Conseil d’Etat. De son côté, Yuan Longping High-Tech Agriculture Co a annoncé l’arrêt des ventes de sa variété « Liangyou 0293 ».

Ne pas tout remettre en cause

rizCe sont plus de 650 hectares de rizières dans six villes de l’Anhui qui ont été touchés en octobre. La compagnie de Yuan Longping justifie le faible – voire nul – rendement des cultures de riz par les températures basses et les pluies persistantes entre juin et juillet 2014 et assure que « l’insuffisance des mesures de prévention a également joué un rôle dans les mauvaises récoltes ».

Le « père du riz hybride » a estimé dans le journal « Hunan Daily » que « l’échec des cultures dans l’Anhui ne saurait constituer une preuve qu’il y a des problèmes dans toutes les variétés de riz hybride« . Ce dernier a expliqué qu’il y a « un risque que la variété Liangyou 0293 ait connu un problème de qualité après des années de culture. Il y a également pu avoir des mutations pathologiques ».

Cependant, « le rendement moyen du riz hybride par mu (0,07 hectare) a atteint plus de 1026,7 kg à ce jour. Même si le rendement est réduit à 70 à 80% de ce montant … nous pouvons encore améliorer le rendement des rizières du pays de façon remarquable » a-t-il assuré. Zhang Taolin a expliqué que « nous avons besoin d’une variété capable de s’adapter à différents environnements de culture. Toutefois, l’évaluation d’une variété est habituellement effectuée dans une zone spécifique. Si cette variété est cultivée ailleurs, sans une évaluation adéquate, des défauts risquent d’apparaitre ».

Toutefois, « le riz hybride demeure un élément important de la stratégie nationale visant assurer la sécurité céréalière ». D’autant plus que ce super riz alimente plus du cinquième de la population mondiale en cultivant 7% des terres arables de la planète et est adopté par plus d’une vingtaine d’autres pays. Le riz hybride représente 30% de la superficie rizicole de Chine, avec plus de 9,07 millions d’hectares de champs de riz hybride au niveau national.

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