vendredi, avril 19

Li Shenzhi, « le peuple pourra assimiler le concept de la démocratie »

Li Shenzhi (1923-2003), connu sous le nom de Li Zhengzhi, a participé à la réforme économique du Parti Communiste Chinois et est considéré par Marie Holzman (1), comme l’un des plus grands penseurs de l’après communisme en Chine.

Né d’une riche famille de marchands de la ville de Wuxi dans la province du Jiangsu, il est éduqué à l’occidentale. Diplômé d’économie, il entre au parti à la fin des années 1940 et sera très vite cataloguer à droite, parce qu’il remet en question le système d’un parti unique.

Li Shenzhi, bouscule les consciences des chinois
Li Shenzhi, bouscule les consciences des chinois

Entre 1941 à 1945, il étudie l’économie à l’université Yanjing de Beijing et puis à St. John’s à Shanghaï. Durant ces années d’étudiant, Li Shengzhi participe au « Secret Parti Communiste de Chine » et est membre de l’ »Association du salut national de la jeunesse démocratique » (National Salvation Association of Democratic Youth).

Trois ans plus tard, Li Shenzhi entre officiellement au parti et devient rédacteur en chef international et directeur adjoint de l’Agence de presse Xinhua. Sa carrière politique entamée, il devient le conseiller diplomatique de Zhou Enlai, alors ministre des Affaires étrangères. Zhou Enlai lui permettra d’ailleurs de participer à la « Conférence de Genève » de 1954 et au « Sommet des Non-alignés de Bandoung » en 1955.

Victime de ses idées « idéalistes« 

Aux côté de Mao Zedong lorsque celui-ci démarre la « Longue Marche » en 1934, Li Shengzhi avait la même ferveur et passion vis-à-vis des idées et de la politique du Grand Timonier. Mais son désir de mettre en place un système plus proche du peuple et de ses droits, lui a valu une « rééducation », voir même un revers très douloureux.

En 1956, il suggère à Mao de mettre en place une « Cour Constitutionnelle« , et lui préconise l’instauration d’une « grande démocratie« , afin « d’étendre les droits politiques du peuple et de leur permettre de s’exprimer dans les décisions importantes qui concernent les intérêts de l’ensemble de la nation » (2). Mao prend cette proposition pour un outrage et l’exclut de la vie politique.

Il est alors considéré comme un « germe nocif« , un « poison politique », un « péril social » voir même un « facteur d’instabilité« . C’est à la mort de Mao et à la chute de la « Bande des Quatre » que Deng Xiaoping le réhabilite.

Retour dans la sphère politique

A la fin de l’année 1978, il devient membre du groupe de rédaction Questions internationales (International Issues Writing Group) établit par le Comité central du PCC. Il suit Deng Xiaoping (3), lors de son voyage aux États-Unis en janvier 1979, où il devient conseiller diplomatique auprès de la délégation qui accompagne Deng Xiaoping.

L’année suivante, il est transféré à l’Académie des Sciences Sociales afin de mettre en place l’Institut de recherche des États-Unis (United States Research Institute), dont il deviendra le directeur en 1982. En 1984, il est l’assistant de Zhao Ziyang – Premier ministre de 1980 à 1987 et Secrétaire général du PCC de 1987 à 1989 – lors de sa visite au États-Unis.

Mais sa renommée est de courte durée, car il quitte son poste en signe de protestation contre la censure et la répression du mouvement démocratique (les mouvements démocratiques de Tian An’men) de 1989. Sid’Ahmed S. écrit dans « La voie de l’Oranie » (4), qu’ »il continuera à bousculer la conscience chinoise », des années plus tard.

Place Tian an men
Place Tian an men

En 1999, dans la lignée de ses idées démocratiques et patriotiques, il publie un essai intitulé, « Fifty Years of Panic, Trials and Tribulations: Lonely Nighttime on Nationale Day », critiquant les sommes dépensées par les officiels, lors de la cérémonie du 50ème anniversaire de la République populaire de Chine. Il remet en cause « la perte de mémoire nationale » (4) et la répression de Tian An’men qui avait « tué dans l’œuf la conscience du peuple » (4).

Penseur de l’après-communisme

Plus tard, il défend avec conviction l’importance de la démocratie en Chine, bien loin des esprits cyniques qui l’entourent, il reste conscient du chemin à parcourir par le pays pour devenir une démocratie.

Il déclare lors d’une conférence en février 2003, « le peuple pourra assimiler rapidement le concept de la démocratie et le mettre en œuvre dés lors que le cadre de la démocratie constitutionnelle aura été fixé, car la liberté est la première des aspirations de l’homme et elle est justement le fondement de la démocratie. » (1)

C’est à sa mort en 2003, qu’une grande partie du milieu intellectuel chinois le reconnaît comme l’un des plus grands penseurs du pays. Ses écrit révèlent d’après Marie Holzman, une grande connaissance de la culture chinoise et une « prise de conscience de l’échec du communisme en Chine » (1).

Notes:

  1. « Écrits édifiants et curieux sur la Chine du XXIème siècle« , de Marie Holzman et Chen Yan, édition L’aube, pp.17-40.
  2. « Li Shengzhi« , b. 1923, Wuxi, Jiangsu, Journalist, Liberal intellectual, écrit par Liu Chang.
  3. « Historique de la réforme de Deng Xiaoping : les premiers pas » de Brigitte Duzan sur Icilachine.com
  4. « L’objecteur de conscience » de Sid’Ahmed S. sur le site de La voix de l’Oranie
  5. « China dot Communism« , émission de radio produite par Tom Morton sur ABC le 28 mai 2000.

A lire également

  1. « Ces disparus qui ont fait le Monde – Li Shenzhi« 
  2. Patricia R.S. Batto, « Marie Holzman, Chen Yan (éds.), Écrits édifiants et curieux sur la Chine du XXIe siècle. Voyage à travers la pensée chinoise contemporaine« , Perspectives chinoises, n°89, 2005

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