jeudi, avril 25

Chinoiserie urbaine

Tribune de Mbolatiana Raveloarimisa (L’Express de Madagascar) – Un étage en feu dans les galeries des immeubles du quartier commercial de Behoririka. Cela étonne-t-il encore ? Ce n’est que le début d’une longue série noire dans la quelle on retrouvera des centaines, voire des milliers de morts dans la capitale. Il ne faut pas être devin pour le savoir et ce n’est pas non plus une prémonition. C’est juste une logique.

Mbolatiana Raveloarimisa, de la Coalition des radios pour la consolidation de la paix. (Photo Facebook)
Mbolatiana Raveloarimisa, de la Coalition des radios pour la consolidation de la paix. (Photo Facebook)

Dans les dédales de ces soit disant magasins il n’y a pas une seule bouche d’incendie, ni d’extincteur et encore moins de sorties de secours. Très surement qu’aucun architecte certifié n’a supervisé ces constructions. Il manque tellement d’aération et de luminosité et juste par l’odeur des marchandises on suffoque. Des fois même, passer par Behoririka est dangereux pour la santé. Il s’y dégage une odeur toxique qui nous inflige une grosse angine et des migraines durant une semaine.

Ce quartier est originellement un marécage aménagé en zone constructible au temps de la colonisation. Il reste de ces marais le petit lac qui est une cuvette de réception des flots pluviaux venant des quartiers avoisinants. Le sol y est alors meuble étant dans une zone de convergence et de stagnation des eaux. A notre connaissance, on n’y a jamais vu des engins pour forger des pieux de fondation afin de tenir de telles structures.

Dans le contexte géo-morphologique de ce genre de milieu, aucun permis de construire ne devrait pourtant sortir sans des expertises du sol et des types de fondations en concordance avec le type de bâtiment. Ces tours sont des colosses aux pieds d’argile qui risquent à tout moment de tomber. Il faut aussi savoir que, la plupart des bâtiments construits là sont ce qu’on appelle des structures métalliques.

Comme tout métal, quand la pression sur lui est trop grande, il fléchit. Sans nul doute qu’aucune réglementation, ni vérification de sécurité ne sont faites pour voir la résistance des matériaux utilisés. Il serait très étonnant que des contrôles soient effectués par rapport aux charges de marchandises que l’on introduit quotidiennement dans ces magasins.

Ce château de cartes finira par brûler ou s’écrouler, c’est juste une question de temps. Mais le danger ne réside pas seulement dans cette agglomération éphémère mais dans sa situation stratégique. Quand viendra ce moment, il balaiera ce qui se trouve dans une zone d’au moins un kilomètre. Dans cette première couronne,  il y a deux stations d’essences qui risquent donc d’exploser : l’une au niveau du Lac, l’autre en haut, au niveau d’Ampandrana.

L’explosion de ces stations impactera sur la deuxième couronne qui compte également quatre stations d’essence : au niveau d’Antaninandro ambony, Antaninadro près du pont, Ankadifotsy et Behoririka ambony. De fil en aiguille, tous ces quartiers seront balayés par des incendies meurtriers. Il ne faut pas également oublier l’un des plus grands stockages de carburant d’Antananarivo qui est la gare de Soarano.

Pure fiction penserons certains. C’est un risque à prendre sérieusement en compte. Et comme d’habitude, les grandes questions resteront sans réponse : qui sont les fous qui ont osé donner les permis de construire à ces hécatombes ? Qui sont les irresponsables qui ont été corrompu par quelques malheureux milliards d’Ariary et qui mettent en péril la vie de milliers de gens ? Car quand Behoririka brulera, toute la ville sera en danger. Nous savons à quel point les flammes d’un incendie peuvent être incontrôlables, surtout dans ce genre de vieux quartier où les maisons sont collées les unes aux autres et où il n’y a que des ruelles piétonnes comme passage.

Entre Behoririka et le dépôt de la Logistique Pétrolière d’Ankorondrano, il n’y a qu’un pas. La sécurité de toute la ville passe inexorablement par un rappel à l’ordre dans ce tissu urbain désorganisé. Il n’est pas encore trop tard, mais il faut avoir les tripes pour le faire. Démantelez dès maintenant ou construisez des tombes.

Mbolatiana Raveloarimisa, secrétaire exécutif de la « coalition des radios pour la consolidation de la paix »

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