vendredi, mars 29

Le ton se durcit à Hong Kong

Durant deux mois, des millions de hongkongais ont foulé le pavé pour s’opposer au gouvernement central chinois, ce mois-ci, le délogement de vendeurs ambulants s’est terminé par une émeute, menée par les localistes, désirant la reconnaissance de l’identité hongkongais, dont font partie les vendeurs ambulants.

La vente du South China Morning Post au géant chinois d’Alibaba, Jack Ma, a suscité de nombreuses critiques et de vives inquiétudes quant à la main mise du pouvoir central sur cette région administrative spéciale, qu’est devenu Hong Kong en 1997. Par la suite, la disparition de cinq libraires a confirmé les craintes des hongkongais de la présence accrue des autorités chinoises dans l’île.

Une dispersion de vendeurs tourne à l’émeute

La tentative de la police de disperser des marchands ambulants a tourné en émeute mardi 9 février à à Mongkok, quartier très peuplé situé dans la partie continentale de Hong Kong. Des dizaines de personnes blessées ont été blessé, et 90 policiers auraient également été touché par du verre brisé, a indiqué la police.

Il s’agit des incidents les plus violents depuis les manifestations pro-démocratie de 2014. Des images télévisées ont montré des gens en train d’arracher les pavés, de foncer sur les policiers munis de boucliers de fortune ou de mettre le feu à des détritus au milieu de la rue.

En face, la police a tenté de ramené le calme, en vain, un officier a été jusqu’à pointer son arme en direction des protestataires qui lançaient des briques, des bouteilles et des palettes en bois sur les policiers. Selon plusieurs médias cités par l’Agence France Presse, la police a tiré au moins deux coups de semonce en l’air.

Veillée à la bougie pour le vingtième anniversaire des manifestations en 2009, à Hong Kong. Wikimedia
Veillée à la bougie pour le vingtième anniversaire des manifestations en 2009, à Hong Kong. Wikimedia

Les évènements se sont aggravés, après la tentative de la police de déloger des vendeurs ambulants non autorisés qui proposaient aux passants de la cuisine de rue, des objets souvenirs, etc. D’après la BBC, certains loyalistes estiment que ces mouvements ont eu lieu en raison de la pression politique faite par les promoteurs immobiliers, qui considèrent les vendeurs ambulants comme une nuisance et pollution visuelle.

D’autres assurent qu’il s’agit d’un refus du gouvernement de reconnaitre les vendeurs ambulants comme une partie intégrante de la culture hongkongaise. Pour eux, cette tentative de dispersion par la police vise à annihiler l’identité hongkongaise et leurs libertés.

Parmi les manifestations, des membres de la mouvance dite « localiste » ont tenté de prendre la défense des vendeurs, assurant qu’ils participaient à l’atmosphère festive du Nouvel an. Cette mouvance (Hong Kong Localism Power) milite contre l’influence de Beijing à Hong Kong et appelle à l’indépendance de l’ex-colonie britannique.

Créé en 2011 sur internet lors des débats sur la réforme politique dans le territoire autonome. L’organisation préconise la protection des valeurs et de la culture des hongkongais, face à la présence accrue des chinois venus du continent et du pouvoir central.

D’ailleurs, les réseaux sociaux ont relayé les événements, les qualifiant de « révolution des boulettes de poisson », nom d’une spécialité culinaire hongkongais. Mais pour le patron de la police de Hong Kong, Stephen Lo, l’officier qui a tiré en l’air n’a fait que défendre son collègue blessé. « Il n’a pas eu d’autre choix que de tirer selon les principes régissant l’usage de la force », a-t-il assuré, annonçant l’ouverture d’une enquête.

54 personnes âgées de 15 à 70 ans ont été arrêtées pour troubles à l’ordre public ou coups et blessures sur les forces de l’ordre. De son côté, le chef du gouvernement de Hong Kong, Leung Chun-yin, a « condamné avec force ces actes de violence ».

L’exception hongkongaise mise à mal

1596-scmp.jpgDepuis quelques années, les Hongkongais ont le sentiment d’une perte de leurs libertés d’expression et de presse. La vente du South China Morning Post au milliardaire Jack Ma a suscité de nombreuses inquiétudes quant à la liberté d’expression dans l’île, car comme l’a affirmé Andrew Collier, ancien journaliste du SCMP, pour qui l’achat du SCMP par Jack Ma, « le contrôle par la Chine d’un journal installé dans une ville qui laisse la presse libre et lui permet de couvrir les problèmes sur le continent ».

Par la suite, la disparition inquiétante de cinq employés de la librairie Mighty Current à Causeway Bay, connue pour sa spécialité dans la vente et l’édition d’ouvrages critiques envers le gouvernement chinois. Les cinq libraires se trouveraient, selon les autorités continentales, auprès de la police.

Pour l’opinion publique et la presse hongkongaise, dont le grand quotidien économique hongkongais Shunpo (Hong Kong Economic Journal) : « le monde de l’édition hongkongaise a-t-il pénétré une zone interdite, et est-il pour cela victime de représailles en dehors du cadre légal ? Le vent mauvais du crime d’opinion a-t-il commencé à souffler à Hong Kong ? Si c’est le cas, la Loi fondamentale qui garantit noir sur blanc la liberté d’expression est cruellement bafouée ».

Face à la pression continentale après la Révolution des parapluies, certains localistes pensent qu’une « action plus directe est nécessaire », pour faire plier Beijing. Deux des fondateurs du groupe localiste « Hong Kong indigène », Edward Leung et Ray Wong, ont expliqué à la BBC que le Mouvement des parapluies a été un échec « complet et absolu ».

Présents lors des manifestations à Mong Kok, Edward Leung a été accusés de sédition et Ray Wong devrait être arrêté prochainement. Pour ce dernier, auparavant Hong Hong était la terre des hongkongais, « mais plus je grandis, plus je remarque que ce n’est plus le cas ». Tous les deux assurent qu’il y aura de nouvelles manifestations, mais cette fois, « je vous exhorte mes compatriotes hongkongais à persister ».

 

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