mardi, avril 16

« Lotus : a roman », la prostitution en Chine

Zhang Lijia, écrivaine et journaliste, vient d’écrire un livre sur la prostituions en Chine, intitulé « Lotus : a roman« , elle explique comment les femmes finissent par travailler dans l’industrie du sexe, qui est « à la fois illégale et omniprésente« .

Construit comme un roman, Zhang Lijia raconte l’histoire d’une femme, originaire du Sichuan, qui migre vers Shenzhen pour gagner sa vie. Cette dernière finit par travailler dans un salon de massage, qui fournit des services sexuels.

L’auteure s’est basée sur les témoignages d’une centaine de prostituée qu’elle a rencontré, parfois accompagné dans leur ville natale, dans le but d’observer la dynamique sociale dans les zones rurales.

Dans une interview accordée à Eric Fish sur le blog de la Société Asiatique, elle explique que ce sont généralement les femmes venant des régions rurales qui travaillent dans cette industrie, soit par nécessité, soit par traite des femmes, soit par choix.

En effet, certaines ont passé des années à travailler dans des usines d’assemblage, dans des conditions difficile et pour un maigre salaires, elles sont par la suite attirées par les emplois dans les salons de massage.

« Au début, la ligne est souvent floue, certains endroits proposent des massages légitimes et aussi des services sexuels, de sorte que les femmes commencent à faire des massages normaux et progressivement commencent à ajouter des services sexuels quand ils voient combien plus d’argent ils peuvent faire« , a expliqué Zhang Lijia.

Le profil des travailleuses du sexe est assez large. Ce sont d’anciennes travailleuses licenciées des petites villes, en particulier à Dongbei. Il y a aussi un certain nombre de femmes âgées, divorcées ou abandonnées par des maris … « Quand ils quittent la campagne pour la ville, très peu prévoient d’entrer dans le travail du sexe. C’est une décision difficile dans la plupart des cas. Parfois, c’est à cause de circonstances personnelles tragiques« .

Le pouvoir de l’argent

Mais quasiment toutes envoient de l’argent à leur famille. Le devoir filial est très présent, car beaucoup de ces femmes ont eu une éducation conservatrice. Il s’agit également d’un moyen pour elles d’être reconnues.

D’autant plus que les familles « ne savent pas ce qu’ils font, mais ils apprécient vraiment le pouvoir apporté par l’argent », à tel point que dans certaines familles, les relations se sont améliorées pour cela.

De plus, « j’ai suivi un bon nombre de travailleurs du sexe dans leur village, et beaucoup avaient changé à cause de la ville. Ils sont devenus beaucoup plus assertifs« , critiquant ouvertement leur famille pour leur manière de vivre, comme « jeter des ordures autour de la maison, ou fumer ».

Ils se le permettent car « ils apportent de l’argent à la maison« . Raison pour laquelle, les travailleuses du sexe font très attention à leur succès quand elles rentrent dans leur ville : « Je suis allé avec une femme à son village et quand nous sommes arrivés, elle a mis des talons hauts, des vêtements à la mode, et fait tout son possible pour attirer l’attention des gens, pour montrer son succès ».

L’image de la vie d’une prostituée n’est pas aussi « misérable » que celle que l’on peut avoir en Occident. En effet, au-delà de la puissance de l’argent, il y a un aspect festif, un relationnel fort entre travailleuses du sexe en dépit de la jalousie, et certaines parviennent à avoir du plaisir qu’elles n’auraient pas eu avec leurs petits amis ou maris.

« C’est une situation très compliquée, ce n’est pas seulement la misère totale », a indiqué Zhang Lijia.

Les inégalités hommes-femmes responsables

Cette dernière met aussi en avant les inégalités entre homme et femme, cause du commerce du sexe en Chine. « Lotus : a roman » évoque l’absence d’éducation scolaire des femmes, car les parents pensant qu’ils vont faire marier leur fille n’estiment pas nécessaire de payer pour l’envoyer à l’école.

L’argent sert principale aux garçons, « c’est une attitude commune dans la Chine rurale, en particulier dans les zones les plus pauvres ». Globalement, « le système politique, bien sûr, est un autre problème ». Cette dernière met en avant le système de résidence, hukou, qui freine les résidents ruraux. Ceux-ci ne peuvent pas inscrire à l’école leurs enfants dans les villes dans lesquelles ils travaillent. Et généralement, quand cela est possible, ce sont les garçons qui sont priorisés.

« En fin de compte, c’est la raison pour laquelle la prostitution est une industrie aussi importante en Chine ». En effet, l’accroissement du niveau de vie et la hausse des inégalités sociales et économiques entre hommes et femmes, « je pense que la culture de la concubine joue un grand rôle ».

Les hommes prennent une concubine ou une maîtresse pour montrer leur haut niveau de vie et leur prestige. Aujourd’hui encore ce ne sont pas les hommes qui sont pointés du doigt par la femme mariée et la société mais la maîtresse/concubine, qui viennent souvent des campagnes.

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