vendredi, avril 19

Manifestation contre un incinérateur à Wuhan

Des habitants du quartier résidentiel de Yangluo à Wuhan sont descendus dans les rues pour protester contre la construction d’une usine de traitement des déchets.

Les manifestants se sont rassemblés les bureaux du gouvernement de la ville, et ont dû faire face à un important contingent de policiers réguliers et anti-émeute. Ces derniers ont fait usage de la force, ce qui a été largement condamnée par les internautes de tout le pays.

Wuhan, comme beaucoup de villes en Chine, est confrontée à un problème d’élimination des déchets, l’urbanisation croissante a entraîné une hausse importante de population dans un même lieu, ne permettant pas de gérer de manière optimale les ordures ménagères.

D’ailleurs, le panneau d’affichage de la municipalité contient plusieurs plaintes concernant les odeurs émanant de la décharge située à Yangluo, ainsi que des préoccupations concernant la construction de nouvelles décharges.

La gestion des déchets est un réel défi pour les autorités locales, comme à Shenzhen, où au moins 69 personnes ont été tuées par l’effondrement d’une montagne de débris de construction et de déchets en 2015.

Les installations de valorisation énergétique des déchets devraient apporter une solution mais les usines qui brûlent des ordures pour produire de l’électricité, sont tout de même très coûteuses en termes d’émissions de gaz à effet de serre.

La centrale de valorisation des déchets de Chenjiachong, construite sur le site d’une décharge déjà existante, coûtera 199 millions de yuans (environ 29 millions de dollars) et, selon les documents d’urbanisme, traitera 2 000 tonnes de déchets par jour. I

Cette construction sera la sixième usine de valorisation énergétique des déchets de la ville. Elle fait surtout partie d’un projet plus vaste visant à créer un parc industriel «à économie circulaire» dans la zone.

Une étude de 2015 dans la Revue internationale de la recherche environnementale et de la santé publique a révélé que les projets précédents d’incinération de déchets rencontraient plusieurs problèmes, comme la «construction illégale d’usines d’incinération de déchets à proximité de zones résidentielles», la manipulation du processus d’évaluation, la participation publique limitée et l’incapacité du gouvernement municipal de Wuhan à appliquer correctement les normes d’élimination, a expliqué The Diplomat.

L’une des usines d’incinération des déchets actuellement en activité à Wuhan, Guodingshan, est située à seulement 100 mètres des immeubles d’habitation. Selon les rapporteurs, aucune des usines ne réussirait une évaluation d’impact sur l’environnement, car leur proximité avec des habitations impacte durablement sur la population et l’environnement.

L’inquiétude persiste chez les résidents, notamment ceux proche de la construction de l’usine de Chenjiachong à Yangluo. Ils s’inquiètent de la capacité de la compagnie d’exploitation à gérer les déchets.

En effet, dans une lettre les habitants ont déploré que la société Wuhan Huaneng Rongcheng Renewable Resources Co., Ltd. (entreprise publique), n’a été créée que le 17 avril 2019, soit deux jours avant que le groupe spécialisé en économie circulaire, Yangtze New City, ne dépose le projet de construction de l’usine.

Les signataires de la lettre, adressée aux autorités locales, se demandent pourquoi cette entreprise a été créé aussi vite, alors qu’il existe des exploitants spécialisés dans le domaine de la gestion des déchets, telles que la CCEPC et Kaidi à Wuhan.

Les habitants craignent aussi l’emplacement de l’usine, située à seulement 800 mètres de certaines résidences. Mais la construction de l’usine, qui a provoqué les manifestations fin juin, a commencé deux mois plus tôt que prévu.

Face à la mobilisation sur place et sur internet, le gouvernement du district indique que, compte tenu de l’opposition du public, le projet ne démarrera pas. Cependant, la brutalité policière en réponse aux manifestations est très critiquée sur les réseaux sociaux.

Interrogés par des médias locaux, des observateurs et experts ont relayé les craintes de la population vis-à-vis des manques de transparence et de consultation de la communauté, a cité The Diplomat.

Conscient de la nécessité du projet, Ding Gaobo, ancien journaliste de CCTV, explique que si le gouvernement ne peut pas prouver sa capacité à contrôler la pollution par des actes, il sera difficile de persuader la population d’approuver l’usine, car rien ne garantit que la pollution n’impactera pas les générations futures.

Face aux réactions jugées excessives par les manifestants et internautes, ces derniers ont assuré que leurs revendications n’étaient pas exagérées : ne s’opposant pas à la construction de l’usine, ils veulent qu’elle soit située loin des habitations.