mardi, mai 20

L’engagement de la Chine en faveur d’une adaptation constante et d’une transformation structurelle

De Project Syndicate, par Zhang Jun – Suite à la sortie de la Chine de sa stratégie « zéro COVID », le gouvernement a reconnu la nécessité de s’attaquer aux risques économiques découlant non seulement des chocs d’offre, mais aussi de l’affaiblissement de la demande globale. Cela nécessitera une réorientation de la politique macroéconomique, auparavant davantage axée sur l’offre.

Parallèlement, après avoir examiné les risques financiers et les coûts environnementaux du récent boom du secteur immobilier, les dirigeants chinois ont réaffirmé leur engagement à atteindre l’objectif à long terme de transformation structurelle. En conséquence, les décideurs politiques cherchent à accroître les flux de ressources vers des secteurs plus productifs, comme les technologies émergentes.

Certes, le gouvernement a mis en œuvre un ensemble de mesures pour stimuler la demande intérieure. Mais ce plan est plus modeste que les mesures de relance agressives de 2009-2011, reflétant le dilemme auquel sont confrontés les décideurs chinois : comment encourager les dépenses des ménages et des entreprises sans gonfler davantage la bulle immobilière ?

Le gouvernement chinois ne laissera évidemment pas les turbulences du marché immobilier se transformer en crise systémique et mettra en place des mesures de soutien croissantes pour le stabiliser. Plus important encore, le ralentissement du secteur rappelle que la Chine doit mettre en place de toute urgence un mécanisme à long terme pour garantir un marché immobilier plus robuste. Cela incitera probablement la Chine à accélérer la transformation de son marché immobilier afin de s’adapter à la nouvelle phase de croissance dans laquelle l’économie entre.

Au cours de la dernière décennie, l’économie chinoise a déjà connu des changements structurels considérables, dans le cadre des efforts officiels visant à s’orienter vers une croissance de meilleure qualité. Outre les dommages causés par la pandémie, une grande partie du paysage économique a fondamentalement changé. Les secteurs et les individus, habitués à la stabilité et aux profits faciles, se retrouvent de plus en plus confrontés à un environnement moins sûr et plus inconnu.

Tout au long de cette période, le gouvernement chinois a évalué les défis auxquels l’économie était confrontée et a systématiquement modifié ses politiques de développement afin de promouvoir l’ajustement structurel. Les décideurs politiques sont parvenus à un consensus sur l’abandon des mesures de relance massives visant à endiguer les bulles spéculatives et sur la nécessité de maintenir un environnement monétaire relativement stable au niveau macroéconomique afin de soutenir l’économie réelle.

Cela explique pourquoi la Chine a toujours privilégié une approche « intercyclique » de la gestion macroéconomique, ce qui implique d’agir plus tôt, par petites étapes et dans une perspective à long terme. Comme l’a souligné l’ancien gouverneur de la Banque populaire de Chine, Yi Gang, dans un discours d’avril 2023, la politique de taux d’intérêt de la Chine avait déjà évolué avant la pandémie, la PBOC adhérant à la règle d’or du taux d’épargne et au « principe d’atténuation », qui appelle à la prudence face à des circonstances incertaines. Éviter la volatilité ou le dépassement des taux d’intérêt est crucial pour supprimer les bulles et créer les conditions d’une croissance équilibrée.

Certes, le maintien d’un environnement de taux d’intérêt réels positifs n’est pas sans coût à court terme. Mais la Chine a échappé aux chocs massifs que peut engendrer l’accumulation de bulles spéculatives. De plus, malgré les revers à court terme, le gouvernement semble toujours privilégier l’amélioration de ses politiques afin de promouvoir le développement économique à long terme. Il est important de garder cela à l’esprit pour comprendre nombre des phénomènes économiques actuels en Chine.

Heureusement, la Chine n’a pas connu de dépression au cours des trois dernières décennies, en grande partie grâce à la vigilance accrue de ses dirigeants face aux risques systémiques potentiels d’une croissance économique rapide. Le gouvernement se montre également réticent à prendre de gros risques par souci de protéger ses intérêts particuliers.

La Chine a dû faire face à d’innombrables défis tout en poursuivant sa croissance économique au cours des dernières décennies, mais le gouvernement les a largement surmontés en encourageant les acteurs du marché à s’adapter et à s’ajuster constamment. L’adhésion de la Chine à l’Organisation mondiale du commerce en 2001, par exemple, n’a pas provoqué de chômage massif, contrairement à ce que certains avaient anticipé. Au contraire, la crainte d’une « invasion » a incité de nombreux secteurs de l’économie chinoise à devenir plus forts et plus compétitifs.

Vu sous cet angle, l’insistance du gouvernement chinois à combiner ses efforts pour accroître la demande intérieure avec des réformes structurelles du côté de l’offre n’est pas surprenante.

Zhang Jun, doyen de l’École d’économie de l’Université Fudan, est directeur du Centre chinois d’études économiques, un groupe de réflexion basé à Shanghai.

Droits d’auteur : Project Syndicate, 2024.
www.project-syndicate.org

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