mercredi, mars 20

70 ans de convergence de vues et d’intérêts avec l’Afrique

Tribune de Yoro Diallo, ancien diplomate malien sur les 70 ans de la République Populaire de Chine (octobre 1949-octobre 2019). 70 ans de convergence de vues et d’intérêts avec l’Afrique

Prof. Yoro DIALLO
Chercheur Principal / Directeur Exécutif du Centre d’Etudes Francophones
Directeur du Musée Africain
Institute of African Studies, Zhejiang Normal University, CHINA

Alors que la République Populaire de Chine se rapproche du 70eme anniversaire (1949-2019) de son indépendance et de sa réunification, mais aussi de l’établissement des relations diplomatiques avec l’Afrique, les attentes des peuples Chinois et Africains sont à la hauteur de leurs ambitions de «construire ensemble une Communauté de destin plus solide», pour paraphraser le Président Xi Jinping. Ce 70eme anniversaire qui aura lieu dans dix (10) mois s’avèrera d’un symbolisme considérable, marquant «les relations Sino-africaines dans la nouvelle ère».

A cette occasion la Chine revisitera sans nul doute ses moments historiques, rendra un hommage vibrant à ses héros, notamment ceux de la «Longue Marche» et réaffirmera son engagement pour la paix dans le monde. Elle exprimera à nouveau sa volonté inébranlable en faveur de «la promotion de la construction d’une communauté de destin pour l’humanité».

La Chine manifestera son amitié sincère et pragmatique envers l’Afrique et sa ferme détermination en faveur du développement du continent. Cette célébration au mois d’Octobre 2019 aura lieu au moment où après Beijing 2018, le Forum sur la Coopération Sino-africaine entame sa marche vers son 8eme Sommet prévu dans trois ans à Dakar en République du Sénégal.

Durant cette période charnière, dans un contexte de changements profonds et d’adversité sur la scène internationale, les dirigeants Chinois et Africains seront ensemble unis dans un partenariat amical afin de renforcer le plan directeur de la coopération Chine-Afrique dans la nouvelle ère.

Les échanges entre la Chine et l’Afrique, leur collaboration dans les différents domaines de la diplomatie et du développement sont propices à l’évolution d’une coopération stratégique globale entre les deux parties pour une coopération gagnant-gagnant Chine-Afrique et un développement commun à un niveau supérieur. A cet égard les Africains pensent que la création du FSCSA a été une excellente proposition.

Nous sommes totalement en phase avec cette affirmation dans la mesure où, grâce au FSCSA, les pays Africains et la Chine ont pu renforcer leur solidarité et leur amitié. Chaque Sommet du Forum a mis en place des mesures de coopération spécifiques. Les Sommets de Johannesburg 2015 et de Beijing 2018 ont suscité de nombreuses réactions à travers le monde au regard des succès enregistrés.

Le FSCSA (FOCAC en français) a contribué à promouvoir le partenariat Sud-Sud et le développement de la coopération mondiale tout en injectant une énergie positive dans le monde entier. Depuis sa création en 2000 il y a donc 19 ans, le FSCSA a été la principale plate-forme institutionnelle et le principal mécanisme de coopération multiforme entre la Chine et les pays Africains.

Les observateurs des relations internationales auront noté que c’est dans le cadre de la diplomatie active du Président Xi Jinping, que le niveau de l’engagement pris par la Chine lors du Sommet de Johannesburg en 2015 a agréablement surpris les Africains et même la communauté internationale.

Les 60 milliards de dollars US (52,8 mds €)* mis à la disposition des pays Africains pour une période de trois ans sous forme de prêts et autres formes d’aide, notamment en faveur des ressources humaines et les infrastructures ont été réaffirmés lors du Sommet de Beijing 2018. Ces 60 milliards de dollars US devraient contribuer de façon remarquable à relever les défis du développement économique social et culturel de l’Afrique.

A l’heure actuelle, la mise en œuvre de manière pragmatique des résolutions du Sommet de Johannesburg a donné une forte impulsion au développement de la coopération Sino-africaine. Beijing 2018 a ancré la coopération Sino-africaine dans sa volonté de bâtir un avenir prospère pour les peuples Chinois et Africains, principalement par le biais du FSCSA et de l’«Initiative la Ceinture et la Route», «Belt and Road Initiative».

Le FSCSA qui regroupe les diplomaties, les économies africaines et la Chine, s’est révélé être un forum multilatéral de premier plan, détenant à presque 19 ans d’existence un vécu impressionnant et un avenir ambitieux pour une prospérité partagée par les deux parties. Le Forum sur la Coopération Sino-africaine est vraiment un brillant exemple de partenariat Sud-Sud. Le partenariat Sud-Sud consiste en un échange de ressources et de politiques entre des économies émergentes afin de parvenir à un développement durable.

En ce moment précis, comme tel est le cas de nombreux pays à travers le monde, la croissance de la Chine enregistre un ralentissement relatif comparativement à sa situation des années 2010, touchant ainsi sa coopération commerciale avec les exportateurs africains de produits de base. Certains critiques voient dans le ralentissement de l’économie de la Chine un coup critique pour les perspectives de croissance du continent africain. Le commerce entre la Chine et les pays Africains est l’un des événements les plus en vue sur l’échiquier international du nouveau millénaire.

En 2000, la Chine et les pays Africains ont créé le Forum sur la Coopération Sino-africaine pour servir de plate-forme diplomatique et économique de haut niveau entre la Chine et l’Afrique. Depuis lors, la Chine et l’Afrique ont enregistré d’énormes progrès économiques. Par exemple, pour chaque tranche de 1 000 Dollars US (880€)* de produits exportés par l’Afrique au début du FSCSA en 2000, environ 3 Dollars US (2,64€)* ont été vendus à la Chine. Dix huit ans après la création du FSCSA, ce chiffre est passé au delà de 24 dollars US (21,12€).

Le volume du commerce Chine-Afrique était de 1 milliard de dollars US en 1980. La création du FSCSA a propulsée ce chiffre à 10 milliards (9,1 mds €) durant les années 2000. Neuf années plus tard, la Chine a dépassé les États-Unis en tant que premier partenaire commercial de l’Afrique avec un volume total de 114 milliards de dollars US (100,32 mds €)*.

En outre, à la fin de 2015, le volume des échanges commerciaux entre la Chine et l’Afrique avait dépassé les 200 milliards de dollars US (176 mds €). Le stock total d’investissements de la Chine en Afrique s’élève aujourd’hui à plus de 120 milliards de dollars (105,6 mds €), avec plus de 3 200 entreprises chinoises installées en Afrique. De nombreux facteurs soutiennent ce dynamisme diplomatique et économique.

Il s’agit tout d’abord d’une convergence des intérêts et des activités économiques. Les convergences des intérêts au sein FSCSA couvrent des domaines tels que les infrastructures, les ressources humaines, l’Industrie, le commerce international, la formation technique de haut niveau. Ce n’est pas un hasard si ce sont aussi des questions similaires qui figurent en bonne place dans l’Agenda 2063 de l’Union Africaine.

La Chine est disposée à partager son expérience de développement avec les pays africains rendant ainsi «hautement compatible» le rêve de l’Afrique et de la Chine en matière de développement durable. Les relations entre l’Afrique et la Chine continuent de se renforcer par le biais des investissements, mais aussi des migrations de part et d’autre.

Suite au 7eme Sommet du FSCSA de Beijing, les Africains bénéficient désormais d’un large éventail d’opportunités pour investir de plus en plus en Chine dans les années à venir, notamment par le biais des foires internationales et d’autres facilités d’ordre administratif et commercial.

Présentement la plupart des investissements africains se font dans la machinerie, les produits pharmaceutiques et la haute technologie telle que l’électronique. Ces investissements sont liés à l’augmentation du nombre d’Africains résidant en Chine. Il y a plus de 200 000 Africains résidant à Guangzhou. Une nouvelle génération de diasporas africaines va bientôt ajouter des caractéristiques uniques à la diversité culturelle mondiale.

Cette évaluation ne prend pas en compte le nombre croissant d’étudiants africains en Chine, dont la plupart bénéficient de bourses offertes par le gouvernement chinois. Contrairement à l’opinion générale, l’intervention de la Chine sur le continent africain ne se limite pas au commerce de produits de base.

La plupart des projets financés par le gouvernement chinois sont conçus pour promouvoir l’industrie manufacturière et le commerce inter-africain. Dans ce cadre l’Éthiopie a acquise des connaissances considérables en matière d’industrie manufacturière grâce à son partenariat avec les Chinois.

Comment les pays africains peuvent-il adapter ces leçons à leurs besoins locaux ? La réponse à cette question constituera le test ultime de la confiance des pays africains en leur capacité à transcender l’héritage post-colonial et à devenir des économies émergentes.

Contrairement aux relations historiques de l’Afrique avec l’Occident, les relations Sino-africaines font preuve d’une plus grande détermination de la part des Africains et de leurs gouvernements pour façonner leur coopération avec la Chine afin de refléter les intérêts du continent.

*taux de change actuel 1 dollar = 0,88 euro