lundi, avril 15

Le secteur immobilier reprend des couleurs en Chine

Durant plus de 20 ans, les promoteurs se sont développés rapidement, grâce aux prêts bancaires mais leur endettement a tellement gonflé que les autorités ont décidé d’y mettre fin à partir de 2020.

Des signes positifs ont été constatés ces dernières semaines, après une année noire, mais un nouvel âge d’or est loin d’être envisagé dans les années à venir. Ebranlé par la crise immobilière, certains promoteurs chinois commencent à sortir la tête sous l’eau sur un marché amené à ralentir durablement. 

Après une forte croissance, la crise 

Le secteur immobilier en Chine a connu une forte croissance depuis sa libéralisation en 1998, dans un pays où l’acquisition d’un bien est un prérequis au mariage et un investissement.

Désormais l’accès au crédit des promoteurs immobiliers s’est considérablement réduit tandis que la demande en biens immobiliers a fortement diminué, sur fond de ralentissement économique et d’une crise de confiance.

Ce phénomène a été exacerbé par la quasi-faillite de l’ancien numéro un du secteur Evergrande, et qui a gagné les autres promoteurs. Ces derniers sont boudés par les acheteurs potentiels qui craignent des déboires similaires.

Evergrande a déclaré, début avril, que son plan de restructuration avait été négocié et approuvé par un groupe de créanciers internationaux. Il s’agit là d’une avancée décisive vers l’allégement de sa dette abyssale. D’autant plus qu’en Chine, la majorité des biens neufs sont payés avant même le début des travaux.

L’immobilier a connu en 2022 « sa pire contraction de l’histoire » avec des ventes en repli de 24%, a souligné Rosealea Yao, du cabinet Gavekal Dragonomics, spécialisé sur l’économie chinoise. Cette dernière a expliqué que la crise sanitaire a été un facteur d’« anxiété » aggravant, poussant de nombreux acheteurs potentiels à reporter l’achat d’un bien.

Le secteur a également du faire face à une grève des mensualités de certains propriétaires, excédés par les interruptions de chantiers d’un certain nombre de promoteurs qui n’avait pas de liquidités. Le boycott des acheteurs a davantage aggravé la crise.

« Le marché immobilier chinois montre des signes de stabilisation »

Après une année noire, « le marché immobilier chinois montre des signes de stabilisation » depuis début 2023, selon l’agence de notation Fitch. D’ailleurs, en mars, les principales villes de Chine ont connu une hausse sensible des prix de l’immobilier, d’après des chiffres publiés par le Bureau national des statistiques (BNS).

Sur 70 villes qui composent l’indicateur officiel de référence, 64 étaient ainsi concernées (contre 55 en février et 36 en janvier). « Il s’agit d’un signal fort qui montre que la reprise tant attendue prend enfin racine », a estimé auprès de l’AFP l’analyste Shehzad Qazi, du cabinet d’études China Beige Book.

« Un rebond est possible ces prochains mois mais à long terme – l’année prochaine ou la suivante – je n’en vois pas davantage », a averti John Lam, analyste immobilier pour la banque UBS. Selon lui, « la population chinoise a commencé à baisser en 2022 », une tendance amenée à se poursuivre et qui pèsera inévitablement sur la demande en biens immobiliers.

Par ailleurs, la « demande spéculative ne revient pas », a indiqué John Lam, au moment où les autorités rappelent que les logements sont faits pour « y vivre, pas pour la spéculation ». Cependant, l’immobilier connaîtra des « rebonds périodiques » mais l’époque d’une croissance rapide est « probablement révolue« , a estimé Shehzad Qazi.

L’immobilier, qui représente avec la construction environ un quart du PIB de la Chine, est un pilier essentiel de la croissance du pays. Ce secteur est aussi une source importante de revenus pour les collectivités locales, dont les finances sont tendues après trois années de fortes dépenses pour lutter contre le Covid.

Pour relancer le secteur, le gouvernement a depuis novembre une approche plus conciliante, avec des mesures de soutien ciblées pour les promoteurs ayant des finances saines et aux résultats contrastés.

En mars, le nombre de mises en chantier de logement neufs s’est contracté de 29% sur un an, après un taux négatif de 9,4% en janvier-février 2023. Et ce, malgré une faible base de comparaison avec 2022 quand l’immobilier en Chine était en pleine tourmente.

Le secteur « n’est pas encore tiré d’affaire », a souligné l’économiste Larry Hu, de la banque d’investissement Macquarie. Selon lui, « les promoteurs restent prudents et donnent la priorité à l’achèvement des projets existants plutôt qu’au lancement de nouveaux ».

Cette reprise actuelle profite essentiellement aux grandes villes (comme Pékin et Shanghai) qui ont retrouvé leur dynamisme de 2019, selon Rosealea Yao. Cependant, le marché immobilier dans les petites villes ne montre toujours « aucune amélioration ». Moins attractives, ces villes risquent à l’avenir de « souffrir d’un exode de population », a indiqué John Lam.

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