mardi, mars 12

Des mesures spécifiques annoncées pour soutenir la politique du troisième enfant

De notre stagiaire Manon KBidi – Le 20 juillet, le Conseil d’État du Comité central du Parti communiste chinois et le Conseil d’État pour l’optimisation de la politique de fécondité, ont annoncé des mesures pour promouvoir un « développement démographique équilibré à long terme » et pour soutenir la politique du troisième enfant.

Pendant de longues années, la Chine a imposé des mesures restrictives sur les naissances pour éviter l’explosion démographique, mais aujourd’hui les experts craignent une crise démographique.

En 1979, la Chine a imposé la politique de l’enfant unique. A l’époque, il fallait se concentrer sur le développement économique de la Chine et limiter les naissances.

En 2015, Xi Jinping a aboli la politique de l’enfant unique et les couples ont été autorisés à avoir deux enfants. Dès lors, le nombre  d’enfants âgés de  0 à 14  ans en Chine  a atteint 253,38  millions en 2020,  soit une  augmentation  de  30,92  millions par rapport à  2010  et une  augmentation de  1,35%.

Cependant, la Chine n’a pas connu de véritable baby boom, bien au contraire, le nombre de naissances a baissé de 2,6 millions de 2019 à 2020. Le 31 mai 2021, la Chine a autorisé les couples à avoir trois enfants. Cette décision a été prise quelques semaines après les résultats inquiétants du dernier recensement décennal.

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De nombreuses raisons ont poussé le gouvernement chinois à changer leur politique de restriction démographique qui a duré plus de 42 ans.

D’une part, pour faire face au vieillissement de la population, les restrictions se sont progressivement desserrées dans toute la Chine. Les experts ont constaté qu’il y a de moins en moins d’enfants et de plus en plus de personnes âgées.

Suite à l’exécution du planning familial, la première génération des enfants uniques est née en Chine, dans les années 1970. Trente années plus tard, les parents de cette génération sont en train de devenir des personnes âgées, ce qui entraîne une baisse de la population active. Car ces derniers n’ont fait qu’un enfant, et cette génération a également eu un seul nouveau né.

De fait, la pyramide des âges est en train de s’inverser. La Chine comptait en 2020 plus de 264 millions de personnes âgées de 60 ans et plus, soit quatre fois la population totale de la France.

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Outre, la politique de l’enfant unique, la chute du taux de natalité a plusieurs origines : le recul du nombre des mariages en Chine, la hausse du coût des logements et de l’éducation, la fertilité plus tardive chez les femmes qui privilégient davantage leur carrière, et l’excès du nombre d’hommes par rapport aux femmes en raison de la préférence traditionnelle pour les garçons.

Selon les chiffres du Bureau National des statistiques, en 2020, le taux de natalité en Chine était de 11,6% et le taux de mortalité 8,2%. Comparé à 2019, le taux de natalité était de 10,4 naissances pour mille habitants, niveau le plus bas depuis 70 ans.

En 2020, le nombre de naissances est tombé à 12 millions contre 14,65 millions en 2019, soit une baisse de 4% par rapport à 2018, c’est le nombre de naissances le plus faible depuis la période du Grand Bond en avant.

La croissance démographique de la Chine a donc ralenti,  avec un taux de croissance annuel moyen de  0,53% au cours des dix dernières années. Ce chiffre est en baisse de  0,04% par rapport aux  dix  années précédentes.

Selon la sociologue Manon Laurent, enseignante à l’Université de Paris et à l’Université Concordia, a expliqué dans un entretien avec Sciences et Avenir les raisons ayant conduit les  dirigeants chinois à lever les restrictions sur les naissances en place depuis plusieurs décennies.

Cette dernière, qui est également membre du bureau du Groupement d’intérêt scientifique Etudes asiatiques (GIS Asie) et spécialiste de la parentalité en Chine et des relations entre l’Etat chinois et la société, a expliqué que

«faire des enfants en Chine aujourd’hui coûte trop cher aux familles, raison pour laquelle la plupart d’entre elles n’ont pas l’intention d’avoir un troisième enfant. Concernant la classe moyenne, des calculs ont été effectués pour évaluer le coût de l’éducation d’un enfant de 0 à 22 ans, lequel s’élève de 80.000 à 250.000 euros».

De plus, «avoir deux enfants est d’ailleurs en Chine un indicateur d’appartenance à une catégorie sociale qui dispose de revenus suffisants pour « pousser »  ses enfants dans la compétition scolaire. Quant aux classes moyennes supérieures, celles de Shanghai ou Pékin, capables d’avoir d’importants budgets dédiés à l’éducation, elles envoient leurs enfants étudier à l’étranger», a indiqué cette dernière.

En effet, un jeune couple chinois d’aujourd’hui souffre de la pression très lourde d’une famille de quatre personnes âgées et d’un enfant. La cellule familiale «421» inclut les époux (tous les deux sont des enfants uniques), quatre parents et un enfant.

Le jeune couple doit alors soutenir quatre personnes âgées et nourrir au moins un enfant. Raison des pressions sociales et familiale imposant au nouveau couple d’avoir un enfant, et désormais plusieurs enfants.

Les parents doivent faire face à des journées «996», c’est-à-dire qu’ils doivent travailler de 9h à 21h six jours par semaines est sont accablés par ces lourdes charges.

Au cours de ces dernières années, le coût de la vie n’a cessé de grimper dans les grandes métropoles de Chine, raison pour laquelle de nombreux chinois ont renoncé à avoir des enfants. D’autant plus qu’en Chine, les allocations familiales n’existent pas et les aides sociales sont rares.

D’après, le journal La Croix, un internaute chinois a commenté sur le réseau Weibo : «pour la génération des milléniaux, chaque couple va donc devoir s’occuper de quatre grands-parents et de trois enfants».

Pour Ye Liu, spécialiste en développement international au King’s College de Londres, la nouvelle politique a « peu de chances de faire remonter considérablement le taux de natalité ».

« Le pouvoir met la responsabilité du vieillissement de la population sur les familles sans engagements financiers concrets », a-t-elle ajouté à l’Agence France Presse.

Selon l’OBS, si la Chine veut vraiment relancer la natalité et assurer le financement des retraites, l’exécutif chinois ne doit pas se contenter d’assouplir les règles, a observé le démographe Yi Fuxian, de l’Université Wisconsin-Madison aux Etats-Unis.

Ce dernier a expliqué qu’«avoir un seul enfant ou même pas d’enfant du tout est devenu la norme en Chine. Permettre un troisième enfant « arrive trop tard » et le seul espoir de la Chine est de copier la politique suivie au Japon : « santé et éducation gratuites, allocations logement pour les jeunes couples »…».

Ainsi, le gouvernement chinois, a pris conscience que ce changement de politique doit être accompagné de changements au niveau des « mesures de soutien » apportées aux familles, notamment pour les congés maternité, les soins pédiatriques et les coûts de l’éducation.

L’objectif de la politique du troisième enfant est de promouvoir le développement équilibré à long terme de la population et de réaliser le rêve chinois du grand rajeunissement de la Chine. L’objectif est de fournir une base solide et une puissance durable à la population.

Voici les principales mesures de soutien envisagées pour soutenir la politique du troisième enfant :

  • Suppression des frais de compensation sociale imposés aux personnes qui enfreignent les politiques de planification familiale et suppressions de tout lien entre cela et les opportunités d’éducation et d’emploi
  • Réduction de l’impôt, logement subventionné
  • Mise en place d’un congé d’allaitement pour les couples avec de jeunes enfants
  • Système de congé amélioré pour les enfants de familles à enfant unique afin de s’occuper de leurs parents
  • Amélioration des niveaux des services de soins pré-nataux et post-nataux
  • Construction d’un système de services de santé reproductive avec une offre et une demande équilibrée
  • Amélioration du niveau de service de l’éducation
  • Développement d’un système de services de garde inclusif
  • Réduction des coûts des soins pour les nourrissons et les enfants de moins de 3 ans et de l’éducation
  • Inspection pour assurer que la grossesse et l’accouchement ne compromettent pas les opportunités de carrière des femmes
  • Assistance complète aux familles spéciales de planification familiale
  • Répondre aux divers besoins de fertilité de la population
  • Favoriser l’harmonie familiale et le bonheur

Au cours de la période du 14e plan quinquennal, la construction d’institutions publiques de crèches et le projet d’expansion des services de crèches inclusives ont été mis en œuvre, et plus de 500 000 nouvelles crèches inclusives démonstratives ont été ajoutées dans 150 villes.

Pour les autorités chinoises, le but est de faire revenir les vertus traditionnelles chinoises, pour que les jeunes attachent plus d’importance à la construction de la famille, à l’éducation et aux traditions familiales.

Les mesures déployées en faveur de la politique du troisième enfant, ont pour but de soutenir les couples financièrement et de les aider à gérer leurs responsabilités parentales en parallèle de leurs métiers. Le gouvernement chinois espère qu’avec ces efforts, ils pourront améliorer le taux de natalité et vaincre le vieillissement de la population.

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