lundi, mars 18

Les pêcheurs migrants maltraités à Taïwan

Le secteur taïwanais de la pêche est accusé d’exploiter et de maltraiter des travailleurs migrants, remettant en cause l’image d’un Taïwan démocratique et équitable.

Taïwan dispose de l’une des plus importantes flottes de pêche au monde. Le secteur est l’un des plus importants dans la chaîne d’approvisionnement internationale des produits issus de cette industrie.

Taiwan est d’ailleurs le deuxième pays au monde en termes de bateaux circulant en haute mer. Parmi eux, des palangriers, chalutiers ou senneurs pour attraper des thons, calmars ou encore balaous du Pacifique.

Cependant, d’après l’Agence France Presse, les méthodes de travail employées à leurs bords sont décriées depuis une dizaine d’années par plusieurs organisations internationales.  

En 2016, Greenpeace avait publié un premier rapport dénonçant les pratiques inhumaines de travail forcé à Taïwan. Malgré les promesses d’action, les abus ont continué. Raison pour laquelle Greenpeace a publié un rapport intitulé “Détresse en mer” (lire le rapport : “Misery at Sea”), qui pointe du doigt la responsabilité de Taiwan.

Mise à l’index l’entreprise taïwanaise Fong Chun Formosa Fishery Company (FCF), l’un des leaders mondiaux du marché du poisson ferme les yeux sur les abus.

En 2020, Washington a pour la première fois inscrit les poissons pêchés en eaux profondes par les flottes de Taiwan sur la liste américaine des produits issus du travail forcé.  

Les flottes taïwanaises peuvent passer plusieurs mois en mer, les sociétés embauchent donc majoritairement des travailleurs migrants, venus d’Asie du Sud-Est.

Ils sont «originaires des Philippines, d’Indonésie ou du Vietnam, […] et triment pour un salaire de misère, parfois sous les coups», a précisé l’AFP. Selon des témoignages récoltés par l’Agence France Presse, certains décèdent en mer.

Le Seafood Working Group, qui regroupe des ONG en charge de surveiller les abus dans ce secteur, estime que 23 000 personnes travaillent sur ces navires.

Les pêcheurs interviewés par l’AFP ont dit travailler en moyenne 21 heures par jour, être battus et insultés constamment, et ils n’ont aucun contact avec l’extérieur, ni avec leur famille.

Selon l’étude réalisée en 2020 auprès de pêcheurs indonésiens par l’ONG Environmental Justice Foundation, un quart des sondés affirment avoir été victimes de violences physiques. 82% ont fait état d’un nombre excessif d’heures et 92% de retenues sur leurs salaires.

Interrogé par l’AFP, Edwin Dela Cruz, président du Centre d’action international pour les marins – une ONG basée à Manille, a expliqué que «cela s’apparente à de l’esclavage moderne».

Des chercheurs et ONG qui ont enquêté sur le travail forcé à Taiwan font état de «violations indéniables des droits de l’Homme». Les pires pratiques ont été observées sur des bateaux appartenant à des taïwanais et pêchant en haute mer, c’est-à-dire en dehors des eaux territoriales de l’île, généralement sous des «pavillons de complaisance».

D’après le Bureau de la pêche dépendant de la commission ministérielle de l’Agriculture, cette industrie génère environ 100 milliards de dollars taïwanais, soit 9 milliards d’euros.  Selon les statistiques du bureau de la pêche de Taiwan, il y a plus de 1 100 bateaux de pêche en haut mer à Taïwan, dont 229 sont des pavillons de complaisance gérés par les Taiwanais.

Le bureau de la pêche de Taiwan a rejeté ces accusations sur le dos des pays d’immatriculation. En 2020, le Da wang battant pavillon du Vanuatu s’est vu interdire d’accoster dans les ports des Etats-Unis en raison de sérieuses allégations d’abus sur les membres d’équipage.

Cependant, le bureau de la pêche a déclaré en septembre2020 que la gestion des pêcheurs sur les navires étrangers relève de la juridiction du pays d’immatriculation, et qu’il serait déplacer de la part des autorités taïwanaises d’intervenir.

Chang Chih-Sheng, directeur de ce bureau a indiqué «si vous continuez à pratiquer la pêche illégale, non déclarée et non réglementée, à imposer des heures supplémentaires aux employés, et s’il existe des preuves pertinentes, nous pourrions interdire au bateau de pêche de revenir à Taïwan à l’avenir. Cette loi est toujours en cours de discussion. Les Taïwanais ont une bonne réputation au niveau international. Nous devons également attacher de l’importance aux droits et protéger le bien-être des marins étrangers».

Il a admit que de nombreux pêcheurs meurent à l’eau, pou remédier à leur sécurité, Taiwan est en train de développer un gilet de sauvetage adéquat, confortable et accessible en termes de prix.

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