dimanche, mars 17

Les africains comprendront qu’il n’y a pas de réel gagnant-gagnant

Njoya Idriss Linge, journaliste spécialisé des questions économiques et financière à l’Agence Ecofin, également responsable du contenu Société Cotées et Finances, a évoqué avec Chine-Magazine.Com la relation entre la Chine et l’Afrique,

Depuis une dizaine d’année, l’Afrique est devenu un continent particulier pour la Chine, qui y trouve les matières premières dont elle a besoin, selon vous, est-ce que la relation entre la Chine et l’Afrique est-elle gagnant-gagnant ?

Toute dépend de ce qu’on met dans le gagnant. La partie chinoise a clairement identifié son gain, ce sont comme vous le dites, des matières premières. Donc, elle n’a pas de souci à se faire de ce côté-là et ses coûts de production et ses objectifs de rendement, permettent aux sociétés chinoises de ne pas rechercher des gisements, qui leur rapportent forcement des marges avec un facteur de 10x ou de 15x.

Au départ les africains pensaient gagner dans l’affaire, mais en réalité ils comprendront, plus tard, que cela ne leur était pas toujours bénéfique. La focalisation de la Chine sur le secteur des mines n’est pas favorable à la création d’emplois, et les infrastructures généralement sont construites avec très peu de transfert pour l’Afrique.

En plus de cela, le continent noir est devenu un gros consommateur des produits venant de Chine parfois de mauvaise qualité, ce qui se traduit par une balance commerciale spécifique largement négative, au contraire des relations avec l’Europe où les africains sont un peu gagnant.

Le gouvernement chinois a annoncé une enveloppe de 60 milliards de dollars pour des projets de développement dans les pays africains, qui en font la demande. Est-ce que cette enveloppe est-elle suffisante et concernera-t-elle réellement les pays dans le besoin ?

Je ne pense pas que la question se pose en ces termes de suffisance ou pas. Il est clair que ce n’est pas suffisant, car les besoins de l’Afrique en infrastructure se chiffrent à 90 milliards par an sur les 10 prochaines années.

La question est quelle est la nature de ce financement, prêt ou don ? Quel est son mode de déploiement, transfert liquide ou octroie de travaux à des entreprises chinoises ? Quel en sont les conditionnalités. La Chine sait très bien que les 60 milliards $ pour cinq ans ne suffisent pas. Cela signifierait un peu plus de 1 milliard $ par pays sur cinq ans et donc 200 millions $ par pays par an. Cela ne représente rien et c’est parfois des infrastructures qui ne desservent pas toujours la productivité.

Face à la montée de la contestation, les autorités chinoises ont décidé de changer leur politique étrangère envers l’Afrique, en mettant l’accent sur la culture et les médias. Ce changement de cap dans la stratégie chinoise est-elle bénéfique pour les peuples chinois et africains et parviendra-t-elle à changer l’opinion de certains africains sur les chinois ?

Il est trop tôt pour apprécier, surtout qu’avec les africains, les réactions ne sont pas uniformes, selon qu’on soit en Afrique de l’est, de l’ouest ou du centre. C’est un processus à suivre. Mais le soft power par la culture est une recette vielle comme le monde

Depuis cinq ans, des intellectuels africains souhaitent que les liens économiques et commerciaux entre les deux parties profitent plus aux peuples qu’aux dirigeants, qui selon eux, profitent pleinement de ces investissements massifs. Partagez-vous cette analyse ?  

La Chine colonise-t-elle l’Afrique ?

Dans une certaine mesure oui, les dirigeants africains ont tendance à vouloir présenter pour seul bilan de recevabilité à leurs peuples que vous vouliez les routes, voici les routes. De ce point de vu, les dirigeants ont atteint leurs objectifs, et le peuple trinque.

OR C’est une erreur, car le développement ce ne sont pas les infrastructures, les routes ou les barrages, mais c’est la manière dont ces constructions ajoutent de la valeur ajoutée aux économies. Personne ne peut démontrer aujourd’hui que ces infrastructures ont réellement généré plus de gains économiques que celles construites par les européens ou les Egyptiens (arab contractors)

Il y a-t-il un néocolonialisme chinois en Afrique ?

Chaque fois qu’un peuple génère une plus forte valeur ajouté dans ses relations économique avec un autre, cela devient une relation extractive et donc une colonisation. Ils l’ont fait à distance, maintenant, on voit de plus en plus arriver des chinois en Afrique, ce sont des signes qui ne trompent pas. Et surtout la Chine est consciente de ce que la croissance se fera en Afrique. Sauf que cette croissance, ils comptent la porter eux-même.

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