lundi, mars 25

Les autorités hongkongaises tacle Taipei

Le gouvernement de la Région administrative spéciale (RAS) de Hong Kong a critiqué les autorités taïwanaises pour leur gestion «irresponsable» de l’affaire de Chan Tong-kai, suspecté dans une affaire de meurtre à Taipei. Cette affaire avait été un élément déclencheur des troubles sociaux qui durent depuis quatre mois à Hong Kong.

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Le jeune homme de 20 ans s’est rendu volontairement aux autorités hongkongaises et a avoué au cours d’une enquête le meurtre de sa petite amie enceinte Poon Hiu-wing à Taïwan en février 2018.

Toutefois, il n’avait pu être condamné que pour blanchiment d’argent, suite à des retraits sur les comptes en banque de sa victime, mais pas pour meurtre. Celui-ci a été commis en-dehors de la juridiction hongkongaise et Taïwan avair refusé son extradition. Chan Tong-kai a donc été remis en liberté ce 24 octobre matin, après avoir passé 18 mois en prison.

La requête de Taipei pour une application trans-juridictionnelle de la loi dans l’affaire Chan montre son «irrespect le plus profond» à l’égard de la juridiction hongkongaise et est «totalement inacceptable», a déclaré John Lee Ka-chiu, secrétaire hongkongais à la Sécurité.

« Les autorités taïwanaises devront porter l’entière responsabilité si la justice ne peut être rendue, du fait des barrières et des restrictions mises en place faisant obstruction à son extradition », a-t-il ajouté, accusant les autorités de Taïwan de rejeter la faute sur Hong Kong et d’êtres mues par des motifs politiques.

John Lee Ka-chiu a également annoncé le retrait officiel du projet de loi sur les extraditions, qui avait déclenché des mois de manifestations anti-gouvernementales. L’affaire Chan a été citée par le gouvernement hongkongais comme la principale raison pour ce projet d’amendement, qui visait à supprimer les failles de la législation concernant les extraditions.

De leur côté, les autorités taïwanaises ont émis un mandat à l’encontre de Chan Tong-kai et demandé au gouvernement de Hong Kong de lui remettre le fugitif. Cependant, il ne peut pas être extradé car il n’y a pas de traité d’extradition entre Taïwan et Hong Kong. De plus, Taïwan refuse d’admettre que le jeune homme est sur son territoire au titre de «visiteur ordinaire».

Le 18 octobre, la cheffe de l’exécutif de Hong Kong, Carrie Lam, a reçu une lettre de Chan Tong-kai exprimant sa volonté de retourner à Taïwan pour répondre des accusations de meurtre à son encontre.

Taipei avait refusé d’accepter Chan Tong-kai sur son territoire, insistant sur la signature d’un «cadre d’assistance mutuelle» juridique avec Hong KOng, tout en demandant à la région de fournir ses éléments dans ce dossier.

Or le 22 octobre, le Conseil des affaires continentales de Taïwan a proposé d’envoyer une escorte policière taïwanaise pour ramener Chan à Taiwan. Le 23 octobre, la dirigeante taïwanaise Tsai Ing-wen a reproché à Hong Kong d’être «réticente à exercer son pouvoir juridictionnel pour rendre justice à la famille de la victime».

Selon elle, Chan ne peut tout simplement pas prendre l’avion et se rendre aux autorités taiwanaises une fois sur l’île, mais il doit être arrêté à Hong Kong.

La secrétaire à la Justice de Hong Kong, Teresa Cheng Yeuk-wah, a rejeté fermement les allégations de Tsai Ing-wen, ajoutant que le Département de la justice de Hong Kong n’avait pas de base légale pour inculper le jeune homme de meurtre ou pour le maintenir en détention.

«Cette affaire relève de la juridiction taïwanaise, car le meurtre s’est déroulé à Taiwan et presque toutes les preuves se trouvent à Taïwan», a-t-elle souligné, se référant au principe territorial de Hong Kong. Ce principe se conforme au droit international, selon lequel les gouvernements peuvent poursuivre en justice les crimes commis sur l’ensemble de leur territoire, mais ne peuvent pas exercer leur juridiction au-delà de leurs frontières.

Pour le gouvernement hongkongais, les policiers taïwanais n’ont pas le pouvoir de faire appliquer la loi à Hong Kong. Tam Yiu-chung, l’unique représentant de Hong Kong du Comité permanent de l’Assemblée populaire nationale (APN), a lui affirmé que la requête de Taïwan place «la politique avant la justice».

D’après lui, il s’agit d’une tactique en vue des élections taïwanaises qui auront lieu en 2020. Le 23 octobre, Chan Tong-kai est sorti et a présenté ses excuses à la famille de la victime et demandé pardon aux habitants de Hong Kong, car son affaire serait été l’élément déclencheur des manifestations anti-gouvernementales.