vendredi, juillet 4

Washington accuse la Chine de se préparer à « utiliser la force » en Asie-Pacifique

Le ministre américain de la Défense, Pete Hegseth, a accusé le 29 mai la Chine de se préparer « à potentiellement utiliser la force militaire » en Asie-Pacifique. Ce discours a été dénoncé par Pékin, alors que Washington a fait de cette région son « théâtre prioritaire » dans un contexte de montée des tensions.

« La menace que représente la Chine est réelle et pourrait être imminente », a affirmé, Pete Hegseth, le chef du Pentagone, au Shangri-La Dialogue de Singapour, le plus grand forum sur la sécurité et la défense en Asie, dans un contexte de tensions commerciales et géopolitiques accrues entre Washington et Pékin depuis le retour de Donald Trump à la Maison Blanche en janvier. Le ministre américain de la Défense a été jusqu’à accuser, le 1er juin, la Chine de se préparer « à potentiellement utiliser la force militaire » en Asie-Pacifique.

Washington joue avec le feu

La diplomatie chinoise a réagi dans la soirée, indiquant avoir officiellement protesté auprès des Etats-Unis et appelant Washington à ne pas « jouer avec le feu ». Le représentant chinois au forum, le contre-amiral Hu Gangfeng, a dénoncé des « accusations sans fondement » destinées « à semer le trouble, à créer des divisions, à inciter à la confrontation et à déstabiliser l’Asie-Pacifique ».

Mais Pete Hegseth a assuré que la Chine « souhaite dominer et contrôler » la région et « s’entraîne tous les jours » en vue d’une invasion de Taïwan, avec une multiplication des manœuvres chinoises autour de l’île. Selon lui, la Chine se prépare « clairement et de manière crédible à potentiellement utiliser la force militaire pour modifier l’équilibre des forces » en Asie-Pacifique.

Le ministre américain de la Défense a également dénoncé la multiplication des incidents impliquant des navires chinois en mer de Chine méridionale, accusant la Chine « de s’emparer et de militariser illégalement » des îles et îlots revendiqués notamment par les Philippines.

En Chine, le ministère chinois des Affaires étrangères a déclaré dans un communiqué que « les États-Unis ne devraient pas tenter d’utiliser la question de Taïwan comme un outil de négociation pour contenir la Chine ».

Le forum Shangri-La Dialogue, sans haut responsable

Le forum Shangri-La Dialogue rassemble tous les ans des responsables issus de l’ensemble de l’Asie ainsi que du reste du monde dans la cité-Etat de Singapour. Pour la première fois depuis 2019 cependant, la Chine n’y a pas dépêché de responsable de haut niveau.

Pour Washington, l’Asie-Pacifique est devenu le « théâtre prioritaire » et les États-Unis « réorientent (leur stratégie) en vue de dissuader toute agression par la Chine communiste », selon Pete Hegseth.

« L’Amérique est fière d’être de retour en Indo-Pacifique, et nous sommes ici pour y rester », a-t-il déclaré. Mais « les alliés des États-Unis dans l’Indo-Pacifique peuvent et doivent augmenter rapidement leurs propres moyens de défense », a-t-il souligné.

« Grâce au président Trump, nos alliés et partenaires asiatiques devraient s’inspirer des pays européens, un tout nouvel exemple » en la matière, a-t-il déclaré. Plusieurs pays européens, à commencer par l’Allemagne, ont annoncé une hausse significative de leurs budgets militaires afin de les porter à 5% de leur PIB face à la menace du président américain de se désengager de la défense de l’Europe via l’Otan.

Présente au forum, la cheffe de la diplomatie européenne, Kaja Kallas, a souligné que « l’Union européenne a changé de braquet et repensé son paradigme pour en faire un projet de paix soutenu par une défense solide ».

Les propos d’Emmanuel Macron jugés « inacceptables »

Les tensions entre les États-Unis et la Chine persistent depuis le premier mandat de Donald Trump, en 2017, qui a notamment infligé à la Chine des droits de douane record. Dans son discours d’ouverture du Shangri-La Dialogue, le président français Emmanuel Macron avait appelé à « bâtir de nouvelles alliances » avec ses partenaires asiatiques pour ne pas être « les victimes collatérales » des « décisions prises par les superpuissances ».

Il a par ailleurs rappelé les autorités chinoises à ce qu’il considère être leur rôle dans la sécurité internationale. « Si la Chine ne veut pas que l’Otan soit impliquée en Asie du Sud-Est ou en Asie, elle doit empêcher clairement la Corée du Nord d’être impliquée sur le sol européen », où elle a déployé des soldats contre l’Ukraine aux côtés de la Russie, a déclaré le dirigeant français.

Répondant au président français, qui avait également établi un parallèle entre la situation de l’Ukraine et celle de Taïwan, la Chine a jugé ces derniers propos « inacceptables ». « Les deux sont de natures différentes, et en aucun cas comparables », a réagi l’ambassade de Chine à Singapour, soulignant que pour Pékin « Taïwan est une partie inaliénable du territoire chinois ».