jeudi, avril 11

La coopération Sino-russe la ceinture d’une nouvelle route de la soie

Par Nankouman KEITA En Chine, les Russes sont l’une des 56 ethnies, ou « nationalités« , reconnue par le pouvoir central : il y a entre 15 000 et 25 000 Russes, descendants de Russes arrivés dans le nord de la Chine (Dalian, Port Arthur) entre 1630 et 1890, et qui sont surtout présents dans le nord du pays, (ils étaient environ 60 000 en 1958).

Avec les diverses crises de l’URSS et la Chine Populaire (rapport Khroutchev, rupture des relations diplomatiques en 1961, affrontements de l’Oussouri en 1969), ce groupe ethnique subira certaines persécutions, qui vont s’apaiser définitivement en mai 1989 avec la réconciliation avec l’URSS.

La Chine et la Russie, deux voisins, deux puissances nucléaires, deux membres du crucial Conseil de sécurité de l’Onu et deux grands partenaires commerciaux. En juin 2012, Vladimir Poutine rencontrait le prédécesseur de Xi Jinping à Pékin, à peine un mois environ après avoir prêté serment en tant que président russe. Les deux dirigeants signaient une déclaration sur l’approfondissement de leur « partenariat stratégique ».

Sur la scène diplomatique, c’est autour du conflit syrien que l’alliance sino-russe fait grincer des dents. Moscou et Pékin ont imposé leur veto à des résolutions sur la Syrie à l’Onu, seuls face aux autres, et notamment aux puissances occidentales. Certains y ont même vu le signe d’une nouvelle guerre froide. Mais dans ces relations, c’est bien les intérêts économiques des deux nations qui priment. Ceux qui furent longtemps des rivaux tentent depuis quelques décennies de renforcer ces liens tout en conservant une part de méfiance Moscou et Pékin ne marchent pas au même rythme. La Chine renforce sa puissance.

En 2012, son Produit intérieur brut a bondi de 7,8%. Celui de la Russie enregistrait 3,5% de croissance sur la même période et stagne aujourd’hui. En ce qui concerne les échanges commerciaux bilatéraux, Moscou fournit des technologies militaires et spatiales ainsi que du pétrole à Pékin tout en important massivement des produits de consommation courante chinois. Les échanges commerciaux ont été multipliés par 14 en 20 ans et ont atteint un record de plus de 68 milliards d’euros l’an dernier, d’après Pékin. L’objectif des deux pays étant de les porter à 77 milliards d’euros d’ici 2015.

La Russie va par ailleurs chercher à étendre son influence et ses intérêts en Chine dans le domaine des hydrocarbures, pour s’affranchir un peu de la dépendance à l’égard de l’Europe. Ce que Moscou souhaiterait, c’est voir doubler les livraisons annuelles de pétrole du géant russe Rosneft qui s’élèvent actuellement à 15 millions  de tonnes. Autre objectif, concernant le gaz: acheminé vers la Chine près de 70 milliards de m3 d’ici 30 ans. D’aucuns soulignent que la Chine est passée d’usine du monde à moteur principal de la croissance mondiale, mais que ses relations avec les grandes puissances d’Asie ou les Etats-Unis restent compliquées. Et du coup, pour renforcer sa stature internationale, Pékin doit consolider ses liens avec Moscou.

Nixon visite la République populaire de Chine en 1972

Après la mort de Mao Zedong, en 1976, les relations entre la Chine et l’URSS s’apaisent. Le 29 mai 1994, lors de la visite du Premier ministre russe Viktor Tchernomyrdine à Pékin, les responsables russes et chinois signent un accord sur le système de gestion de la frontière sino-russe destiné à faciliter les échanges transfrontaliers et entraver l’activité criminelle. Le 3 septembre de la même année, un accord de démarcation a été signé fixant la frontière le long d’un 55 km disputé tronçon de la frontière sino-russe occidentale.

Un accord complémentaire de 2004, entre la République populaire de Chine et la Fédération de Russie sur la partie orientale de la frontière sino-russe, où la Russie accepte de transférer une partie d’îlot d’Abagaitu, toute l’île de Yinlong (Tarabarov), environ la moitié de l’île Bolshoy Ussuriysky et quelques îlots adjacents à la Chine. Un différend frontalier entre la Russie et la Chine, depuis l’invasion japonaise de la Mandchourie en 1931, a ainsi été résolu.

Les relations diplomatiques entre la République populaire de Chine et la Fédération de Russie considérablement améliorés après la dissolution de l’Union soviétique et la création de la Fédération de Russie en 1991. Selon, l’universitaire américain Joseph Nye c’était: « Avec l’effondrement de l’Union soviétique, que de facto l’alliance des États-Unis et de la Chine a pris fin. Un rapprochement sino-russe a commencé en 1992, avec les deux pays déclarant qu’ils étaient à la poursuite d’un « partenariat constructif « ; en 1996, ils ont progressé vers un «partenariat stratégique», et en 2001, ils ont signé un traité « d’amitié et de coopération ».

À la veille d’une visite d’État à Moscou par le président chinois Xi Jinping, le président russe Vladimir Poutine a fait remarquer que les deux pays ont été d’établir une relation spéciale. Les principales étapes de ce rapprochement comprennent les événements suivants. Le 23 décembre 1992, le président russe Boris Eltsine visite pour la première fois la RPC et rencontre Yang Shangkun, établissant des relations mutuelles dans lesquelles les Chinois et les Russes s’accordent à signer des déclarations communes, dont 24 documents et mémorandums d’entente sur la coopération sur un large éventail de questions, y compris la délimitation et les réductions des forces armées près de la frontière sino-russe.

Le 3 septembre 1994, à la fin d’une réunion du sommet de Moscou, entre le président Boris Eltsine et le président chinois Jiang Zemin rendre public une déclaration commune définissant leurs relations bilatérales comme un « partenariat constructif ». Les deux dirigeants s’engagent à ce que leurs pays ne fassent pas usage des armes nucléaires l’un contre l’autre.

Le 3 mai 1998, les ministères russes et chinois des Affaires étrangères annoncent mettre en place une liaison téléphonique Hotline entre les présidents des deux États. En décembre de cette année, à la fin de la visite du Premier ministre Li Peng à Moscou, la Russie et la Chine publier un communiqué commun en s’engageant à construire un « partenariat égal et fiable ». Cette politique vise à limiter l’influence des États-Unis sur la scène politique internationale comme leur principal concurrent sur la scène politique mondiale.

En 2001, la Russie et la Chine fondent l’Organisation de coopération de Shanghai(OCS), rejoints par le Kazakhstan, le Kirghizistan, le Tadjikistan et l’Ouzbékistan, dont l’un des objectifs principaux est de viser à contrer l’influence des États-Unis en Asie centrale. La République populaire de Chine est actuellement un acheteur clé de l’équipement militaire et des licences russes, dont certains ont joué un rôle déterminant dans la modernisation de l’Armée Populaire de Libération. La Chine est également le principal bénéficiaire de l’oléoduc entre la Sibérie orientale et l’océan Pacifique. En décembre 2017, les deux pays se sont engagés à approfondir leur coopération militaire.

La proximité contemporaine entre Russie et Chine est néanmoins questionnée par l’expression de certaines rivalités nationales, notamment sur le plan du transfert de technologie militaire, de l’exploitation des champs d’hydrocarbures en Sibérie ou de l’influence régionale, notamment vers l’Inde, le Pakistan et le Vietnam.

Les relations sino-russes sont devenues une relation entre deux grands pays qui se caractérisait par le plus haut degré de confiance mutuelle, de coordination, et la valeur stratégique la plus importante depuis l’établissement des relations diplomatiques bilatérales il y a 70 ans. « Nous devons toujours nous considérer l’un et l’autre comme d’importantes opportunités de développement, nous soutenir de manière réciproque et tirer parti de nos forces respectives pour parvenir ensemble à une revitalisation », a souligné M. Xi Jinping. Soulignant que la Russie est un partenaire important dans le développement conjoint de l’initiative « la Ceinture et la Route », que l’alignement de l’initiative avec l’Union économique eurasiatique était un modèle de coopération économique régionale.

Les deux parties doivent continuer de promouvoir la coopération dans les domaines de l’économie, du commerce, de l’énergie, des sciences et des technologies, de l’aérospatiale, de la connectivité, ainsi que la coopération au niveau infranational, les échanges entre les peuples et les échanges culturels, a précisé le président chinois, annonçant que le pays enverrait une paire de pandas géants en Russie pour la recherche conjointe. Xi Jinping a également noté que la Chine et la Russie devaient intensifier leur coordination dans les affaires internationales, défendre conjointement l’autorité des Nations unies et du Conseil de Sécurité des Nations unies, respecter le droit international et les normes universellement reconnues régissant les relations internationales, promouvoir fermement la multipolarité et la démocratie des relations internationales, et défendre le multilatéralisme.

L’initiative « la Ceinture et la Route », proposée par M. Xi Jinping, a fourni une plateforme importante et a donné l’exemple en matière d’expansion de la coopération internationale, et obtenu un soutien croissant de la communauté internationale, a déclaré M. Poutine, ajoutant que la présence de nombreux de chefs d’Etat et de représentants à ce forum en était une preuve. A l’occasion des célébrations du 70e anniversaire des relations diplomatiques, la Russie est prête à renforcer les contacts de haut niveau avec la Chine, à approfondir les échanges bilatéraux et la coopération dans divers domaines, par exemple en réalisant de grands projets exemplaires dans les secteurs de l’énergie et de la connectivité, selon M. Poutine.

Les deux chefs d’Etat ont également procédé à un échange de vues sur plusieurs questions, telles que la situation sur la péninsule coréenne et au Venezuela. Ils sont convenus de communiquer et de coordonner plus étroitement leurs efforts dans le cadre des affaires internationales et régionales et au sein des institutions multilatérales. Le même jour, le président Xi Jinping a assisté à une cérémonie à l’Université Tsinghua, au cours de laquelle M. Poutine a reçu un doctorat honorifique.

L’Université Tsinghua est une université de renommée mondiale et l’alma mater du président Xi Jinping, a déclaré M. Poutine. « En présence de mon bon ami le président Xi Jinping, l’Université Tsinghua m’a décerné un doctorat honorifique et a organisé une grande cérémonie. Je me sens honoré et profondément touché ».M. Xi  Jinping a dit qu’il espérait que les jeunes étudiants chinois et russes contribueront à l’amitié entre la Chine et la Russie pour les générations à venir.

Le Pont qui relié en Chine et la Russes

Comment la nouvelle route de la soie (encore en chantier) risque de bouleverser les relations entre la Chine, l’Asie centrale, la Russie et l’Europe. Un road movie géopolitique captivant. Relier l’ouest de la Chine à l’Europe grâce à un axe routier et ferroviaire long de 10 000 kilomètres, telle est l’ambition du projet de développement économique et social lancé par le président chinois Xi Jinping en 2013. À l’heure où les tensions militaires s’accumulent en mer de Chine, où les menaces nord-coréennes entraînent l’envoi d’une armada américaine en mer du Japon, il devient urgent pour Pékin d’ouvrir des voies alternatives.

L’Empire du Milieu regarde donc avec insistance vers l’Asie centrale et ses abondantes ressources pétrolières mais aussi vers l’Europe, son principal partenaire économique. Des villes comme Chongqing ou Lanzhou, jusqu’alors oubliées des réformes, profitent des nouvelles infrastructures pour se développer, tout comme certaines localités du Kazakhstan. Mais cette volonté de déploiement jusqu’au bord de l’Oural, aux portes de la Russie, pourrait perturber l’alliance stratégique entre Xi Jinping et Poutine.

Face à cette influence grandissante, rien ne garantit que le grand frère d’hier témoigne d’une éternelle bienveillance… Nouvel élan Étayé d’analyses de politologues, ce documentaire éclairant nous emmène le long de la nouvelle route de la soie encore en chantier. Si le film relaie le discours plein d’espérance des Chinois, enthousiasmés par la perspective d’explorer ce vaste territoire en TGV, il montre également les réactions négatives de certains habitants des steppes du Kazakhstan qui redoutent cet expansionnisme sur leurs terres. Ce pont autoroutier d’un kilomètre relie la ville russe de Blagovechtchensk à celle de Heihe, dans la province chinoise du Heilongjiang. Évoquée depuis près de trente ans mais constamment reportée, la construction de l’ouvrage vient de franchir une étape symbolique : les parties russe et chinoise ont été reliées ce vendredi, un événement pour les médias locaux.

Relation ambivalente

Les travaux avaient finalement débuté fin 2016 après de longues tergiversations côté russe : au-delà des questions juridiques que posait ce projet transfrontalier, la prudence de Moscou traduisait surtout une relation toujours ambivalente à l’égard du voisin chinois. Un voisin qui suscite historiquement la méfiance mais qui incarne de sérieuses perspectives économiques.

Mise en service au printemps 2020

Pour Iouri Trutnov, représentant spécial du président Poutine dans le district de l’Extrême-Orient, ce pont va non seulement favoriser les échanges bilatéraux, mais aussi attirer les investissements chinois dans la région. Sa mise en exploitation est annoncée pour le printemps 2020. La jonction des deux berges de l’Amour intervient à quelques jours du Forum économique de Saint-Pétersbourg auquel assistera le président chinois Xi Jinping.

Relations économiques et énergétiques

Vladimir Poutine et Jiang Zemin en 2001 après la signature d’un traité d’amitié. La république populaire de Chine est actuellement l’un des principaux partenaires économiques de la Russie et achète une quantité importante de matériel militaire russe, contribuant à moderniser l’Armée populaire de libération. Depuis janvier 2011, un gazoduc permet le transport annuel d’environ 15 millions de tonnes de pétrole de la Russie vers la Chine populaire.

Toutefois, les négociations entre la Chine et la Russie au sujet de deux autres oléoducs se heurtent à désaccord de prix. La Russie est également impliquée dans la construction de réacteurs nucléaires à Tianwan. Selon Xiao Xinjiang, de l’Energy Research Institute, « La Chine et la Russie ont un grand potentiel de coopération dans le secteur des déchets nucléaires, puisque la Russie est très avancée dans ce domaine ». En octobre 2011, lors d’une conférence de presse conjointe à l’issue de pourparlers avec les autorités chinoises, Poutine annonce que son pays coopérera avec la Chine dans des secteurs de pointe, tels que la fabrication des avions, la nanotechnologie, la biotechnologie, l’informatique, et la médecine.

En mai 2014, la Chine et la Russie signent un accord gazier d’une valeur de 400 milliards d’euros. Cet accord consiste à une livraison de 38 milliards de mètres cubes de gaz à la Chine par la compagnie énergétique Gazprom, pour une période de 30 ans. Le gaz, provenant de la Sibérie, sera acheminé par un gazoduc (Force de la Sibérie) d’environ 4 mille kilomètres de long. Les coûts reliés à la construction des infrastructures nécessaires s’élèveront à environ 27 milliards d’euros. Cette signature représente la plus grande transaction jamais effectuée entre les deux pays.

L’acheminement de ce gaz à la Chine lui permettra d’avoir une nouvelle source d’approvisionnement énergétique pour contrebalancer sa consommation importante de charbon, réduisant ainsi son émission de CO2 dans l’atmosphère, et améliorant du même coup la santé publique chinoise. « Bons voisins, bons amis et bons partenaires » avait déclaré Xi Jinping à propos de la Chine et la Russie, lors de sa visite à Moscou en juillet dernier. Le partenariat russe est plus que jamais d’actualité pour Pékin alors que la guerre commerciale avec les Etats-Unis s’intensifie.

A Vladivostok, le président chinois sera accompagné de hauts responsables du parti, venus de neuf provinces. Objectif, élargir les domaines de coopération. « Nos relations entrent dans une nouvelle ère », a ainsi affirmé Zhang Hanhui lors d’une conférence de presse en amont du sommet. Le volume des échanges sino-russes a atteint près de 50 milliards d’euros entre janvier et juillet, soit une hausse de 25,8 % depuis le début de l’année, selon le ministre adjoint au ministère chinois des Affaires étrangères. Celui-ci se targue d’avoir « de grands projets en matière d’infrastructures, de transports, mais aussi dans les nouvelles technologies, les sciences et le e-commerce ».

La Chine, qui cherche à diversifier ses fournisseurs, devrait encore augmenter ses importations de soja en Russie. Et, côté russe, Vladimir Poutine entend resserrer ses liens avec l’Asie. Il sera en tous cas question aussi de la paix dans la péninsule coréenne lors de ce forum, même si on ne sait pas encore si le dirigeant nord-coréen répondra à l’invitation. Sur le plan stratégique, le forum économique de Vladivostok coïncide avec les exercices conjoints de Vostpok. 30 avions de combat et 3 200 troupes d’élite de l’armée populaire de libération participent à ces jeux de guerre russo-chinoise, le plus grand exercice militaire depuis la chute de l’URSS.

En Conclusion

Je suis par ailleurs plutôt optimiste quant à l’avenir des relations sino-russes. Cela fait tout d’abord déjà plus d’une décennie qu’elles se développent. L’évolution des situations internationale et intérieure a démontré aux deux pays la nécessité d’une coopération stratégique. Au fur et à mesure qu’avancent la mondialisation et le combat antiterroriste, il devient indispensable de procéder à une coordination régulière des positions aux plans international, régional et même bilatéral. Les progrès économiques de la Chine offrent des opportunités aux entreprises russes ; côté chinois, les équipements, technologies et matières premières provenant de Russie comptent également beaucoup. Bref les intérêts communs continueront de resserrer des liens entre les deux pays.

De surcroît, le sommet de l’appareil d’État joue ici un rôle décisif. Le XVIe congrès du Parti communiste chinois a renouvelé la direction chinoise ; peu de temps après, le président Poutine s’est rendu en visite officielle à Pékin où il a rencontré M. Hu Jingtao, le nouveau Secrétaire général du Comité central du PCC. Les deux dirigeants affirmant une volonté de promouvoir le développement des relations sino-russes ; ils se sont aussi entretenus amicalement par téléphone à la veille de l’an 2003. De bonnes relations personnelles qui ne peuvent que bénéficier au développement des relations entre les deux États.

Comme la Chine et la Russie ont enfin déclaré à plusieurs reprises que leur partenariat stratégique ne visait aucun pays tiers et n’empêchaient pas non plus les deux parties de développer des relations avec des tiers, il n’existe aucun motif valable pour que quiconque s’oppose à leur avancée.


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