vendredi, avril 26

La violence n’empêche pas l’unité du mouvement hongkongais

La frange radicale des manifestants multiplie les dégradations contre les entreprises accusées de soutenir le gouvernement pro-Beijing. Cette escalade de la violence vise parfois des individus et n’a pas pour autant entamé l’unité du mouvement.

Durant plus de quatre mois, l’ex-colonie britannique vit sa pire crise politique depuis sa rétrocession en 1997. Et ces deux dernières semaines ont été les plus violentes.

L’exécutif local, la police et les relais du gouvernement central chinois sont les causes de la contestation depuis juin. Mais, depuis que les autorités ont interdit le 4 octobre le port du masque aux manifestants, les plus radicaux sont montés d’un cran dans les actes de vandalisme ciblés contre certaines entreprises privées.

Au point que les commerces sont désormais répertoriés avec un code couleur :

  • jaune pour ceux qui soutiennent la mobilisation avec des ristournes pour les étudiants engagés ou en distribuant de l’eau les jours de manifestation.
  • bleu pour les magasins et restaurants hostiles qu’il faut boycotter.
  • rouges pour les entreprises ayant des capitaux chinois, et dont il faut maculer les façades de tags et autocollants expliquant la lutte.
  • noir pour les sociétés accusées d’être liées aux Triades ou d’apporter un soutien actif au gouvernement. C’est le cas par exemple de MTR, l’opérateur du métro qui est pointé du doigt pour avoir transporté les renforts de la police et fermé certaines stations pendant les manifestations.

Au cours des premiers mois de la mobilisation, des foules manifestaient pacifiquement, mais ces dernières semaines donnent lieu à des violences, avec même des agressions physiques de partisans de Beijing.

Or malgré les tensions, « ni Pékin ni l’exécutif hongkongais n’ont donné aux manifestants de raisons de reculer », a déploré le politologue Dixon Sing.
Au contraire, les forces de l’ordre ont musclé leurs actions, en tirant un millier de grenades lacrymogènes en juin et juillet, puis 2.000 en une seule semaine début octobre. Près de 2.400 personnes ont été arrêtées en quatre mois.

« La majorité des Hongkongais continue de penser que la responsabilité principale réside dans la collusion entre Pékin, le gouvernement hongkongais et la police », a indiqué Dixon Sing.

« L’augmentation de la violence policière est un des principaux facteurs du soutien encore très large dont bénéficient les manifestants, y compris les radicaux qui sont de plus en plus violents », a ajouté ce dernier.

Signe de la méfiance des contestataires vis-à-vis des forces de l’ordre, des manifestants ont passé à tabac le 13 octobre à Tseung Kwan O, un homme accusé d’être un policier infiltré.

Le mouvement s’organise essentiellement en ligne, où le débat sur l’opportunité du recours à la violence fait rage. En dépit des échanges, la stratégie ne change pas, car beaucoup de modérés sont convaincus que sans les radicaux, surnommés les « braves » au sein du mouvement, jamais le gouvernement n’aurait reculé en septembre sur le projet de loi sur les extraditions, point de départ de la contestation.

« Même si nous ne soutenons pas totalement ce qu’ils font, nous essayons au moins de faire preuve de compassion et de compréhension », a indiqué la députée pro-démocratie Claudia Mo, qui défend la non-violence.