vendredi, avril 19

La piété filiale imposée par la loi

Le 2 juillet 2013 est entrée en vigueur la loi sur la protection des droits et intérêts des personnes âgées, obligeant les membres de la famille à se soucier des besoins psychologiques de leurs parents et à leur rendre visite ou communiquer avec eux de façon régulière.

L’objectif de cette loi est de « protéger les droits et intérêts légitimes des parents de 60 ans et plus, et pour perpétuer la vertu de piété filiale« , d’après l’agence de presse Xinhua.

Vertu importante de la culture chinoise traditionnelle, la piété filiale signifie le respect envers ses parents et ancêtres, y compris être bon envers ses parents et accomplir sa tâche de prendre soin d’eux.

A cette loi s’ajoute, une nouvelle législation visant à faire face au vieillissement de a population et destinée à améliorer la sécurité sociale pour les personnes âgées.

Une loi contestée et difficile à être appliquée

Interrogé par Xinhua, un étudiant d’une vingtaine d’année de l’Université des affaires et sciences économiques internationales, a expliqué qu’il s’agit d’une « politique importante et je suis très heureux de voir le gouvernement promulguer une telle politique pour encourager les enfants à remplir leurs engagements envers leurs parents« .

Yuan Xin, professeur d’études démographiques à l’université Nankai de Tianjin, salue la loi mais atteste de la difficulté de la mettre en application : « en Chine, traditionnellement, prendre soin des personnes âgées est de la responsabilité des unités familiales. C’est une bonne vertu traditionnelle, et à ce titre, elle ne devrait pas être abandonnée« .

A contrario, certains doutent de l’efficacité de cette loi, y voyant une contrainte : « la politique peut être bonne, mais je pense qu’elle est difficile à appliquer », a déclaré un garde de sécurité de l’hôtel Yinghua de Beijing. « En tant que travailleur temporaire, j’ai rarement congé, et je dois même travailler à la fête du Travail et à la Fête nationale« , ce qui l’empêche de rendre visite à ses parents.

Les parents dont les enfants ne viennent pas les voir peuvent demander une médiation ou intenter un procès, en vertu de la loi. mais celle-ci n’a pas clairement définie le nombre de fois où les enfants devraient aller voir leurs aînés. De fait, cette loi « manque de force coercitive », pour Yuan Xin.

Ce dernier a également souligné que malgré « des améliorations à la sécurité sociale pour les personnes âgées, le système de sécurité sociale est toujours en retard par rapport à leurs besoins ».  

De plus, certains experts, comme le docteur Liu Kaiming, sociologue à Pékin, soulignent que « l’urbanisation et la population migrante ont brisé l’ancien modèle de soutien aux parents, c’est la réalité, alors que la population âgée ne cesse de croître ».

Une première condamnation

Le 2 juillet 2013 le tribunal de Wuxi (Jiangsu) a condamné une jeune femme a allait rendre visite à sa mère, âgée de 77 ans, au moins une fois tous les deux mois et à l’occasion d’au moins deux des fêtes et jours fériés du pays dans l’année.

Cette loi répond aux inquiétudes grandissantes sur le sort des personnes âgées, alors que la structure familiale se décompose sous l’effet des profonds bouleversements économiques et sociaux de ces trente dernières années.

Plusieurs faits divers de maltraitance de personnes âgées par leurs enfants, souvent par négligence délibérée, ont scandalisé le pays entier.

Les enfants invités à prendre soin de leurs parents

Sur Internet, plusieurs personnes ont dénoncé la volonté du gouvernement de culpabiliser les gens et de leur imposer ces règles. Pour  Wen Ling, professeur de français à Chengdu (Sichuan) :

« Tous les Chinois savent ce qu’ils ont à faire pour leurs parents, la dette qu’ils leur doivent pour les avoir élevés et amenés à avoir un bon travail. Mais la vie a changé en Chine. Il faut gagner beaucoup d’argent pour vivre correctement, aller loin de sa ville ou de son village natal pour trouver un bon emploi. Et souvent, les parents âgés restent isolés, loin des enfants qu’ils ne voient qu’une fois par an, pour le Nouvel An. Mais ça, le gouvernement le sait depuis des années. Il ferait mieux d’ouvrir des maisons de retraite et d’assurer aussi comme en France un système de retraite quasi inexistant ici ».

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