mardi, avril 23

Taiwan : un conflit avec la Chine aurait des «conséquences désastreuses»

Le ministre taïwanais des Affaires étrangères, Joseph Wu, a indiqué lors d’un entretien avec l’Agence France Presse au ministère des Affaires étrangères à Taipei le 2 août 2023 qu’une invasion chinoise de Taïwan aurait des « conséquences désastreuses » sur le plan mondial.

Une invasion chinoise de Taïwan aurait des « conséquences désastreuses » sur le plan mondial, a déclaré le ministre taïwanais des Affaires étrangères Joseph Wu, invoquant l’importance stratégique de l’île en matière de semi-conducteurs et de voies de navigation.

Cette mise en garde intervient à quelques mois de la présidentielle et dans un contexte de pressions politiques et militaires accrues sur l’île autonome de la part de Pékin. La Chine considère Taïwan comme sa 23ème province à rattacher au continent, et si nécessaire par la force.

Pour Joseph Wu, le recours à la force aurait des répercussions à l’échelle internationale. « Ce que nous devons faire, c’est expliquer à la communauté internationale que tout conflit impliquant Taïwan aurait des conséquences désastreuses pour le reste du monde », a affirmé le ministre, évoquant l’invasion de l’Ukraine par la Russie qui a entraîné des pénuries alimentaires et d’énergie, ainsi qu’une inflation galopante.

Les conséquences d’un conflit entre la Chine et Taiwan seraient essentiellement commerciales. Plus de 50% des conteneurs transportés dans le monde transitent par le détroit de 180 kilomètres de large situé entre Taïwan et la Chine continentale. Cette voie de navigation est un des « éléments cruciaux de la sécurité et de la prospérité internationales ».

De plus, Taiwan détient un quasi-monopole en matière de production de semi-conducteurs, des composants indispensables à l’économie mondiale, des voitures aux téléphones portables en passant par les missiles.

A six mois des élections présidentielles

« Pensez aux perturbations de la chaîne d’approvisionnement », a-t-il déclaré lors d’un entretien avec l’AFP. « Nous espérons que le gouvernement chinois n’aura pas recours à la force contre Taïwan, car les conséquences seraient trop graves pour la planète ».

A moins de six mois de l’élection présidentielle de janvier, Joseph Wu affirme que Taiwan est victime d’une campagne de désinformation « plus sophistiquée » visant à influencer le vote des électeurs.

« Ce que la Chine a fait » en ayant recours à des tactiques « de guerre cognitive, c’est de changer l’opinion de la minorité critique ici à Taïwan – pour qu’elle vote autrement afin de changer le résultat de l’élection », a-t-il affirmé.

Joseph Wu appartient au Parti démocrate progressiste (PDP) au pouvoir, perçu comme plus favorable aux Etats-Unis que le principal parti d’opposition, le Kuomintang. La dirigeante de Taiwan Tsai Ing-wen, membre du PDP et à la tête du pays depuis 2016, ne peut plus se représenter à cette nouvelle élection.

En avril, le parti au pouvoir à Taïwan a désigné comme candidat le vice-président William Lai, connu pour ses prises de position tranchées pour l’indépendance de l’île. «Je suis très honoré d’avoir obtenu la nomination du Parti démocrate progressiste pour prendre part à l’élection présidentielle de 2024 et de défendre le devoir de sauvegarde de Taïwan», avait déclaré ce dernier lors d’une conférence de presse du PDP.

Taiwan scrute son voisin chinois 

L’attention mondiale sur les tensions entre les deux rives du détroit a connu un pic en 2022, conséquence selon Joseph Wu de l’invasion de l’Ukraine par la Russie. Cependant, la visite de Nancy Pelosi en août 2022 a exacerbé les tensions entre les deux territoires, par la suite les visites officielles américaines à Taipei ont accentué la colère de Pékin.

« La communauté internationale regarde autour d’elle et se rend compte que Taïwan pourrait être la prochaine cible », a expliqué le chef de la diplomatie taiwanaise, soulignant que 2027 est souvent cité comme l’année d’une possible invasion par la Chine.

Des responsables américains ont estimé que la Chine n’aurait pas la capacité militaire d’entreprendre une telle opération avant cette date. Toutefois, de nombreux experts attestent qu’en cas d’invasion, la Chine aura une avancée supérieure à celle de Taiwan.

Taïwan observe également « avec prudence » les récents bouleversements politiques en Chine, notamment lorsqu’en fin juillet, le ministre des Affaires étrangères Qin Gang a été brusquement évincé.

Le gouvernement a annoncé fin juillet, sans la moindre explication, son remplacement après sa disparition pendant un mois de la scène publique. « Il s’agit d’un environnement dans lequel nous devons être très prudents en matière d’observations. Nous ne voulons pas devenir le bouc émissaire des problèmes chinois », a affirmé Joseph Wu.

Taïwan fait face à des incursions quasi-quotidiennes d’avions militaires chinois dans sa zone de défense aérienne et de navires de patrouille depuis la visite en août dernier, de Nancy Pelosi, alors présidente de la Chambre des représentants américaine à Taïwan, suscitant l’ire de Pékin.

Cette fréquence « place Taïwan dans une situation où notre défense en profondeur est réduite, où notre temps de réponse est raccourci, où la menace militaire est plus sérieuse que jamais », a estimé Joseph Wu.

Le soutien moral et l’aide militaire, notamment de Washington, sont les bienvenus, même si Taïwan ne « compte pas sur les États-Unis pour faire la guerre » à sa place. « Nous comprenons que (…) la défense de Taïwan relève de notre propre responsabilité », a déclaré le ministre taiwanais, ajoutant que le pays ne renoncerait « pour rien au monde » à sa « souveraineté » et sa « vie démocratique ».

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