jeudi, mars 7

La loi anti-subversion plane sur les hongkongais

L’interdiction du Parti national par le gouvernement laisse planer d’après certains médias l’adoption de la loi anti-subversion inquiète les milieux d’affaires.

Le gouvernement hongkongais interdit un parti indépendantiste

L’article 23 de la Constitution prévoit que le gouvernement rédige un projet de loi sur la sécurité nationale pour interdire « la trahison, la sécession, (et) la subversion » contre le pouvoir central chinois.

Cette clause n’a jamais été mise en oeuvre, car l’opinion publique craint une remise en cause des droits de Hong Kong, tels que la liberté d’expression et de la presse. Ces libertés sont garanties par l’accord de rétrocession conclu entre Londres et Beijing en 1997, en vertu du principe « un pays, deux systèmes ».

En 2003, le gouvernement avait dû renoncer à mettre en oeuvre l’article 23 à cause des importantes manifestations. Mais aujourd’hui, les choses ont changé, car la clause est à nouveau en discussion.

Les autorités chinoises font semble-t-il pression pour qu’elle soit adoptée, alors qu’une nouvelle mouvance indépendantiste suscite la colère de Beijing. Pour la cheffe du gouvernement hongkongais Carrie Lam a souligné qu’il était du « devoir constitutionnel » de Hong Kong d’adopter cette loi sur la sécurité nationale.

Le ministre hongkongais de la Sécurité a interdit le Parti national de Hong Kong (HKNP), sur la base d’une « ordonnance sur les sociétés » datant de l’ère coloniale. Il s’agissait là d’une première depuis 1997, prouvant la volonté des autorités de réprimer toute revendication indépendantiste.

Interrogée par l’Agecne France Presse, Suzanne Pepper, professeur honoraire à l’Université chinoise de Hong Kong, a expliqué que cette répression croissante « annonce les définitions, transgressions et punitions qui feront partie de la loi hongkongaise » une fois adoptée le texte anti-subversion.

L’application de l’article 23 « entre dans le cadre de la campagne menée par Beijing pour supprimer le séparatisme sous toutes ses formes, dans tous ses territoires et pour imposer sa définition de ‘Chine unique’. Cela contredit les promesses faites à Hong Kong dans l’accord de rétrocession », a expliqué cette dernière.

Carrie Lam, cheffe de l’exécutif hongkongais

« Petit à petit, Hong Kong est en train d’apprendre que Beijing attache les définitions chinoises à tous ces droits et libertés » a assuré Suzanne Pepper.  En effet, le gouvernement a expliqué qu’il était tenu d’appliquer la clause controversée, précisant qu’il ne le ferait qu’en temps voulu. Carrie Lam craint de vives réactions de la part de la population si elle applique cette clause.

Pour le député pro-Beijing, Felix Chung, il vaut mieux que Hong Kong rédige lui-même sa loi plutôt que Beijing impose sa propre législation à l’ancienne colonie britannique. Les parlementaires modérés souhaitent inclure dans le texte des réformes politiques, afin d’apaiser les inquiétudes des démocrates. Mais le gouvernement chinois ne devrait pas accepter cette solution, a expliqué Felix Chung, ajoutant que « du point de vue du gouvernement central, la sécurité nationale ne peut pas être négociée ».

De son côté, Martin Lee, député démocrate vétéran membre de la commission qui avait rédigé la Loi fondamentale, regrette aujourd’hui cet article 23 car il pensait que la clause inclurait le suffrage universel pour Hong Kong. Ce dernier a indiqué à l’Agence France Presse qu' »après toutes ces années, les gens n’ont plus confiance dans le gouvernement central », estimant que l’article pourrait « servir à jeter les gens en prison ».

Le milieu des affaires craint aussi la remise en cause de l’Etat de droit ayant permis à Hong Kong de devenir une place financière florissante. Jack Lange, président de la Chambre de commerce américaine à Hong Kong, a expliqué que la législation sur la sécurité nationale devra être « soigneusement rédigée » pour rassurer les entreprises étrangères.  Il s’agira pour lui de « voir à quel point ils se serviraient de cette loi pour enquêter sur quelqu’un, empiéter sur ce qu’il fait, exiger qu’il fournisse des données et d’autres informations ».

Quant aux médias, l’autocensure est déjà à l’oeuvre à Hong Kong, mais celle-ci pourrait s’aggraver. Chris Yeung, président de l’Association des journalistes de Hong Kong, a indiqué à l’Agence France Presse que le texte pourrait être « délibérément vague » afin de faciliter les poursuites contre les cibles politiques.

« Plus le gouvernement chinois se sentira en situation d’insécurité, plus il va serrer la vis. Les autorités ne se contentent plus du « tigre de papier. Ils veulent un vrai tigre qui mord », a assuré ce dernier.

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